France-à-fric en Centrafr…hic?
Lors de sa campagne électorale, François Hollande avait, fort opportunément pris ses distances avec ces pratiques d’un autre âge, annonçant la signature immédiate de l’acte de décès de la Françafrique, s’il était élu.
Au secours, la Françafrique revient! C’est le cri de ralliement des patriotes africains et/ou africanistes, depuis le sommet de l’Elysée des 6 et 7 décembre sur la paix et la sécurité en Afrique convoqué par le Président français, François Hollande. Les valeureux patriotes y ont vu un retour à peine voilé des fameux sommets France-Afrique qui transpiraient le néo-colonialisme, avec un Chef d’Etat français paradant au milieu de dirigeants d’une cinquantaine de pays africains. Négativement connotée, la Françafrique, faut-il le rappeler, était associée à des réseaux officieux auxquels l’on prêtait moult coups tordus en Afrique, des coups d’Etat aux interventions militaires politiquement et économiquement orientées.
Lors de sa campagne électorale, François Hollande avait, fort opportunément pris ses distances avec ces pratiques d’un autre âge, annonçant la signature immédiate de l’acte de décès de la Françafrique, s’il était élu.
Quand François Hollande reçoit une quarantaine de Chefs d’Etat africains, les patriotes africains y ont de suite vu, la renaissance de la Françafrique. On a beau parler d’économie, d’investissements privés, de protection des espèces en voie de disparition, ou de causes humanitaires, rien n’y fait. Les patriotes africains ne sont pas contents. Les tenants de l’Afrique aux Africains ont piqué une crise de nerfs lorsque, aidée d’une résolution du conseil de sécurité des Nations unies, la France a lancé, voilà 6 jours, l’opération « Sangaris » en République centrafricaine, un pays emblématique des heures sombres de la Françafrique. Dans les milieux bien-pensants d’Afrique et dans des salons parisiens, on dénonce l’interventionnisme français comme annonciateur d’une nouvelle ère de recolonisation insidieuse de l’Afrique.
C’est la deuxième guerre de François Hollande en l’espace d’un an et demi, fustigent les panafricanistes révolutionnaires. Et nous voilà rattrapés par les vieux démons de la fuite devant nos responsabilités.
Loin de nous toute apologie de l’interventionnisme français ou autre en Afrique. Nous sommes des adeptes fervents de «L’Afrique aux Africains». Nous n’en sommes pas moins convaincus que l’Afrique aux Africains restera un slogan creux si rien n’est fait pour lui donner un contenu concret, à la fois opérationnel, fonctionnel et utile.
Les patriotes africains ont assisté, impuissants, à la colonisation du nord malien par les groupes jihadistes et terroristes alliés aux narco-trafiquants. Les organisations africaines sont allées de sommets en sommets, sans parvenir à mobiliser les moyens militaires, logistiques, humains et financiers nécessaires pour donner un contenu à «L’Afrique aux Africains». Pendant ce temps, les terroristes avançaient triomphalement vers Bamako, pour y créer un Etat Al Qaeda, assassinant des innocents sur leur passage, démolissant des lieux historiques mondialement consacrés, lapidant les femmes jugées infidèles. Lorsque la France est finalement intervenue pour stopper l’avancée des terroristes, les patriotes africains ont crié au loup français.
En Centrafrique, ils ont adopté la même posture du spectateur, effarouché certes par les meurtres et autres scènes de barbarie, mais impuissants à changer le cours des choses. Dans ce pays abonné aux conflits armés et aux changements inconstitutionnels de gouvernement, une guerre civile a commencé en décembre, s’est muée en boucherie en mars, puis en renversement du Président (démocratiquement) élu, avant la plongée dans le chaos et l’horreur Ces dernières semaines, les témoignages les plus terrifiants s’accumulaient, avec une bonne dose de fatalisme: égorgements, viols, actes de torture, punitions collectives. Avec d’anciens rebelles devenus de vulgaires bandits, des groupes d’autodéfense sans pitié, et un Etat dramatiquement absent, la Centrafrique était devenue une terre de massacres à ciel ouvert, et aucun patriote africain ne semblait capable de faire cesser ces drames.
La force panafricaine déployée sur place? Impuissante. Que faire? Laisser éclater une guerre confessionnelle à relents ethniques? Laisser les Centrafricains s’entretuer était une option. La France a choisi d’intervenir. Les massacres de grande ampleur ont diminué et devraient cesser. Mais, les valeureux patriotes africains, silencieux pendant ces événements, ne sont pas contents. Ils accusent François Hollande d’interventionnisme. L’Afrique aux Africains signifie-t-il laisser les Africains s’entretuer jusqu’à ce qu’une force africaine perpétuellement en attente, se constitue un jour pour voler à leur secours?
Valentin Mbougueng