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LASSANA BATHILY: Cérémonie de la naturalisation du héros malien musulman de l’Hyper Casher

La belle histoire d’un jeune héros! 

Lassana Bathily est français. Mardi 20 janvier, à 19 h 30, le chef du gouvernement, Manuel Valls, lui a remis de sa main trois symboles d’entrée dans la citoyenneté française. Le jeune Malien, héros de la prise d’otages du supermarché casher de la porte de Vincennes, le 9 janvier, a reçu du premier ministre une lettre signée du chef de l’Etat, un passeport et une médaille. Trois preuves concrètes que son rêve d’enfant, «devenir français», était bien devenu une réalité. Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, y a ajouté un livre d’Ernest Renan et un autre du photographe Raymond Depardon. Deux regards sur la France. 

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La cérémonie d’entrée dans la citoyenneté française de ce Malien de 24 ans s’est déroulée dans la salle des fêtes du ministère de l’intérieur, place Beauvau. Une salle surchauffée par la large affluence des journalistes, mais aussi par un parterre très VIP. Un auditoire à la hauteur du geste de ce jeune qui a risqué sa vie pour en sauver d’autres. Le premier ministre, Manuel Valls, avait tenu à être présent sur l’estrade, et dans la salle ses ministres étaient nombreux, de Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Education nationale et de l’enseignement supérieur, à la Garde des sceaux, Christiane Taubira. A leur côté, les représentants des grandes religions avaient aussi fait le déplacement pour saluer le nouveau citoyen français, comme les associations qui l’ont aidé à rester en France, ses collègues de l’Hyper Cacher ou son employeur.

«Je ne suis pas un héros, je suis Lassana» 

Si Lassana Bathily a déclaré vouloir prendre «un peu de recul» face au tumulte médiatique qui l’assaille depuis le 9 janvier, il a montré lors de cette cérémonie une remarquable modestie et une grande distance par rapport à son geste. Après avoir «remercié ceux qui [lui] ont fait confiance et soutenu depuis toujours» et souligné qu’il pensait là en particulier à «ses parents», le jeune homme a rappelé un vibrant «je ne suis pas un héros, je suis Lassana et je resterai moi­-même».

Il a salué la mémoire de son collègue et ami Yohan Cohen, tué par Amedy Coulibaly. «J’ai perdu quelqu’un que j’aimais beaucoup», a­-t­-il tenu à rappeler, «quelqu’un avec qui j’ai beaucoup ri. On s’appelait “Boss­boss”», a-­t­-il pudiquement avancé, comme un cri du cœur. 

Lassana Bathily, c’est au départ un parcours de migrant comme tant d’autres. Né en juin 1990, dans un village de la région de Kayes, au Mali, le jeune homme quitte sa mère pour rejoindre son père à Paris. Aîné d’une fratrie de trois enfants, il partage sa vie entre son foyer et l’école républicaine. Il est scolarisé dans un lycée professionnel du nord de Paris, où il prépare un CAP de carreleur. 

«Une erreur manifeste d’appréciation»  

En 2010, cet élève «respectueux, sérieux et intelligent» décroche son diplôme, comme le raconte un de ses enseignants. Mais n’a toujours pas de papiers. Son parcours en France aurait même pu s’arrêter là, puisqu’il se retrouve sous le coup d’une obligation de quitter le territoire, à la fin de l’année 2010. Bernard Cazeneuve rappelle que le tribunal administratif reconnaît alors que cette décision du préfet est «une erreur manifeste d’appréciation». Mais c’est grâce à ses anciens profs du lycée, dont plusieurs sont membres du Réseau Education sans Frontières, qu’il ose mener cette démarche. Le jeune Malien obtient, à leur côté, un titre de séjour, en juin 2011. Il renouvelle ensuite son titre, sans problème, année après année, jusqu’à son acte de bravoure du 9 janvier. 

Faut­-il croire le ministre de l’intérieur lorsqu’il lui lance un «vous auriez été naturalisé, car la citoyenneté française n’est pas réservée aux braves»? Les données chiffrées ne plaident pas vraiment pour les paroles ministérielles, puisque seuls 57.610 personnes ont obtenu la nationalité française par décret en 2014. C’est peu, mais la courbe est ascendante, et le chef du gouvernement a rappelé lors de cette cérémonie avoir «relancé le processus de naturalisation, car c’est une chance pour notre pays».

Debout à côté de l’orateur, son dos courbé comme un effet secondaire d’une haute stature, ou pour ne pas paraître bien plus grand que les deux ministres de la République, Lassana Bathily a gardé les yeux vers le sol durant tous les compliments qui ont pu lui être faits.

«Vous êtes un des visages de cette France en l’honneur de laquelle ont défilé près de 4 millions de Français», lui a déclaré Manuel Valls. «Vous participez pleinement au projet de la France», a ajouté Bernard Cazeneuve.

Derrière les mots ministériels, sur le ton solennel du moment, le premier ministre comme le ministre de l’intérieur ont su donner à ce moment des accents de sincérité. Bernard Cazeneuve a osé, une fois n’est pas coutume, utiliser l’image de son père, instituteur de la République, réunissant des enfants de confessions différentes autour du savoir. Manuel Valls, lui, a laissé poindre ses souvenirs d’enfant né ailleurs.

Mardi 20 janvier, la France a gagné un nouveau citoyen. Un chemin d’espoir pour tant d’immigrés qui rêvent un jour aussi de vivre ce moment. Même si ce n’est pas sous les ors du ministère de l’intérieur. 

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