4 lustres illustres!
Samedi 9 mai au Grand Théâtre National, Ndongo D et Faada Freddy célébraient le 20ème anniversaire de leur formation musicale, qui à l’origine était pourtant un trio, et qui ne finira par s’appeler «Daara J Family» qu’en 2007.
Minutieusement préparé et conçu comme une histoire qui s’amusera à valser entre le passé et le présent, ce spectacle à la fois musical et chorégraphique, a été aussi le lieu d’une communion entre deux artistes et leur public d’inconditionnels. Entre deux notes de musique, les deux complices ont trouvé même le temps de les appeler au civisme.
C’est en se jouant du temps, souvent à coups de rétrospectives musicales, que Daara J Family a célébré ses 20 ans d’existence. Conçu à la manière d’un long récit de près de 3 heures, le spectacle s’est ouvert sur quelques grondements de tam-tam et sur l’une des plus célèbres sentences du défunt conservateur de la Maison des esclaves de Gorée. «L’histoire ne ment pas», disait Boubacar Joseph Ndiaye, même si désormais cette phrase appartient aussi au répertoire de Daara J qui en 1998, conviait Joseph Ndiaye à partager son titre «Gorée», extrait de l’album «Xalima ».
Sur un coin de la scène, il y a cet arbre artificiel (Xalima Tree) que l’on entreperçoit, caché par un pan du rideau rouge, et où pendent quelques bouts de papier symboliques à la place d’éventuelles feuilles vertes. Même en noir et blanc, certains personnages sont parfaitement reconnaissables : l’historien et égyptologue Cheikh Anta Diop ou encore la romancière Mariama Bâ auteure d’«Une si longue lettre».
Si les deux complices et héros de la soirée se sont faits encore plus ou moins désirer puisqu’ils n’étaient pas physiquement sur scène, le public a pu se contenter d’une sorte de présence symbolique, avec quelques-uns de leurs tout-premiers morceaux repris par une dizaine de jeunes gens plutôt doués: un cadeau plusieurs dizaines de nostalgiques qui ont comme qui dirait grandi avec le groupe, et qui n’ont pas hésité à reprendre en chœur et à tue-tête chacune des chansons. Entre les introvertis qui se contentaient de danser sagement sur leurs sièges, et les autres, plus démonstratifs.
Accompagnés à la fois par les musiciens et par la chorégraphie d’une quinzaine de jeunes aux gestes acrobatiques, Ndongo D et son complice Fada Freddy ne sont montés sur scène qu’une trentaine de minutes plus tard: le premier dans un par-dessus carrelé rouge sur noir, le second dans une veste indigo. Entre les artistes et leur public d’inconditionnels, c’est une longue histoire. Cette familiarité avec le répertoire musical de Daara J Family, cette complicité quasi naturelle…
Il faut dire aussi que lorsque commençait le spectacle, il n’y a plus que très peu de place disponible pour ne pas dire qu’il n’y en a plus du tout. Et les moins chanceux parmi les spectateurs se sont retrouvés à devoir rester debout ou alors à squatter les quelques marches disponibles sur les allées du milieu. «Peu importe», disait l’un d’eux. Dans la salle en mode clair-obscur, les spectateurs, dont certains avouaient n’avoir raté aucune des prestations du groupe, se sont amusés à filmer toute la scène. Lorsque le duo a entonné des morceaux à succès comme «Tomorrow» ou comme «Waccel sa grif», ils étaient quasiment tous debout. Et idem lorsqu’ils ont reconnu les premières notes de «Deloussil», la récente chanson d’amour du groupe, ou même celles de «Bayi sa yoon», un titre un peu plus engagé.
Sur scène, Daara J Family ne s’est contenté d’ailleurs pas que d’une prestation essentiellement musicale. Le duo s’est adressé aussi à ses fans, avec un discours sur le civisme, sur la responsabilité citoyenne, sur le respect de l’environnement et de la chose publique. Et pour se faire entendre, les artistes se sont même fait rejoindre sur scène par de tout jeunes «porteurs de pancartes».
Lorsque est tombé le rideau rouge du Grand Théâtre, on entendit alors cette petite phrase à la fois philosophique et optimiste prononcée par Faada Freddy, un peu comme s’il s’agissait d’une recommandation: «Il n’y a pas d’autre couleur que celle de l’Humanité». Ce sera le mot de la fin.
De «Daara J» à «Daara Family»:
Lord Aladji Man ou la rupture de 2007
A l’origine, le duo était bel et bien un trio qui finira par se faire amputer de l’un de ses membres, Lord Aladji Man. L’appellation Daara J Family est un concept plutôt récent, qui ne date en fait que de 2007. Mais Ndongo D et Fada Freddy, les deux «survivants» de cette composition musicale dont le premier album, «vendu à plusieurs milliers d’exemplaires», remonte à 1995, n’ont pas vraiment fait de distinction entre les dates et les époques. Ce qui ne change pas grand-chose finalement puisque dans le fond, l’ancien compère n’apparaîtra pas une seule fois, même pas dans le récit de la première période, et pas même de manière allusive: pas de présence physique sur scène, et encore moins un quelconque extrait sonore, même lointain, de son aventure avec ses collaborateurs d’alors.