Valentina Diouf (23 ans) est une des volleyeuses les plus fortes de l’équipe de l’Italie. Impossible de ne pas la noter car elle tape les 2m: sur cette « différence », elle a écrit un livre intitulé « Quando Sarai Grande » (Quand tu seras Grande).
La plupart des fillettes désirent devenir princesses. Mais pour certaines, le rêve est un peu plus compliqué. Car les héroïnes des fables n’ont pas les boucles crépues, la peau café au lait et les jambes tellement longues à s’encastrer dans le lit. Valentina Diouf (23 ans et 202 centimètres) est une des joueuses les plus fortes de l’équipe nationale italienne de volley-ball. Dans son livre intitulé « Quando Sarai Grande », elle se raconte: de l’enfance à l’adolescence, loin de la famille, axée vers un futur au volley-ball, et, dans l’intermède, les difficultés d’être une fille “hors-gabarit » et « exceptionnelle ».
«J’ai toujours été une girafe. A l’école maternelle, on me prenait pour une enseignante. Au collège, j’avais déjà passé 1m80: dans la rue, tout le monde se retournait à mon passage. J’aurais bien aimé être transparente», déclare Valentina, métissée de père sénégalais et mère italienne,née et élevée dans la province de Milan. «Quand j’étais petite, il n’y avait pas beaucoup d’enfants étrangers dans mon village, mais j’ai eu de la chance, on ne m’a jamais insulté, ni s’est moqué de moi. Autrement, je me serais vraiment fâchée: je suis timide et je parle peu, mais le racisme, ça je ne supporte pas. Malheureusement, en Italie, ça se respire encore beaucoup».
Valentina s’assombrit légèrement et avoue que, quand elle voit le drame des migrants au journal télévisé, elle ne peut s’empêcher d’être bousculée: «Je me sens pessimiste, notre pays n’est pas prêt pour une société multiethnique. C’est une question de culture, d’ouverture mentale. Un ami m’a fait remarquer que si on prenait une carte du monde et on la renversait à 180°, on verrait l’Afrique au premier plan, immense et imposante, tandis que l’Europe est petite avec l’Italie qui deviendrait un point minuscule. Voilà, nous devrions tous changer notre point de vue pour accepter et comprendre qui est différent»« .
Cette championne qui abasourdit avec ses meurtriers smatchs, a toujours été accompagnée par l’idée de la diversité d’autrui: «Je n’ai jamais été comme les autres adolescents. Au début, je souffrais, puis j’ai pigé que je devais être plus maligne et exploiter ma particularité. Aujourd’hui, je le dis aux filles que je rencontre: la beauté n’est pas s’homologuer, mais étonner. Je suis une Cendrillon pointure 46! C’est une bataille que de me trouver des godasses, parfois je me les fais confectionner sur mesure, mais je ne renonce pas au talon: ça me fait sentir moins athlète et plus féminine! C’est pareil pour l’habillement aussi. J’adore faire du shopping et je suis comme la star du film « I Love Shopping »: les habits me parlent», dit Valentina.
Et d’expliquer: « Une robe est trop courte parce que je suis trop grande de taille? Ok! J’aime être féminine et, de temps en temps, c’est agréable de faire voir les jambes. En bref, la diversité frappe à coup sur. Sur ce point-là, le sport m’a donné un grand coup de main: c’est démocratique et juste, le volley-ball surtout« .
Sur le parquet du volley, la grande taille de Valentina a toujours été un atout, tout comme sa détermination: «J’ai débuté que j’étais gamine, fulgurée par les dessins animés japonais « Mila et Shiro: deux coeurs au volley-ball », et je n’ai plus arrêté, malgré ceux qui me disaient que je n’étais pas assez douée, et les sacrifices. À 15 ans, j’ai quitté la maison pour aller au Club Italie, à Rome. Si je veux quelque chose, je l’obtiens. Mes défauts? Je suis un peu méfiante, surtout avec les hommes. Peut-être est-ce à cause du manque de relation avec mon père. Il nous a quittées quand j’avais 2 ans. Maintenant, il y a eu un gros rapprochement, mais ça n’a pas été facile. Heureusement qu’à adoucir cet aspect-là, y pense mon fiancé (le basketteur Maurizio Vorzillo, ndlr). ça fait 6 ans qu’on est ensemble et maintenant nous allons habiter sous le meme toit« .
Quand elle parle d’amour, Valentina chuchote, montrant clairement sa timidité: «Je suis très conservatrice et fidèle. Je ne pense pas encore au mariage, mais j’y rêve souvent. Mon premier vœu s’appelle Rio 2016: Jeux Olympiques! Je veux y aller et je veux la jouer pour remonter la déception du championnat du monde, quand j’ai raté le podium d’un souffle. Dans l’avenir, je me vois au contraire avec des gosses, trouvant un équilibre entre famille et travail; comme maman à laquelle je m’inspire; elle m’a élevée toute seule, c’est une vraie caïde. Elle m’a enseigné à voyager pour ouvrir l’esprit et à méditer».
Entre les deux, quelque querelle rangée ne manque toutefois pas. La dernière? Les trois tatouages sur le corps de Valentina: «Le plus grand est au dos. C’est la main de Fatima, l’un des symboles de l’Islam. Cela me rappelle ma grand-mère paternelle que, malheureusement, je n’ai jamais connue. Cela fait partie de moi, mes racines africaines, que je veux mieux connaitre. Renouer les ficelles de l’histoire, ça fait toujours du bien», conclut la sage championne italo-sénégalaise, avec plein de sagesse.
Valentina Diouf a joué à Bergamo, Busto Arsizio et actuellement elle milite au LJ Volley Modena.
Ndèye Fatou Seck Wade