Chantage de l’otage?
Au cours de sa visite officielle en France, le président nigérien, Mahamadou Issoufou, a évoqué, avec son homologue français, François Hollande, le sort des otages français enlevés par AQMI (Al Qaida au Maghreb Islamique), dont 4 travaillaient pour AREVA, la société française qui exploite l’uranium nigérien.
Depuis septembre 2010, date de leur enlèvement, on apprend aujourd’hui de la bouche du président nigérien qu’ils sont en vie et qu’ils vont bien.
Une bonne nouvelle pour Paris qui fait de la libération de ses ressortissants une priorité. Mais voilà, depuis mars 2012, les choses se sont gâtées au Mali, pays de repli des preneurs d’otages, coupé en deux, suite au soulèvement de la rébellion touarègue. Cette donne a probablement bouleversé les tractations en cours pour obtenir la libération des otages.
Ansar Dine, groupe armé inconnu jusque-là, a servi d’interface au médiateur Blaise Compaoré pour libérer deux otages occidentaux (suisse et italien). Pas encore de Français au rendez-vous. Pourquoi?
Ces otages-là valent leur pesant d’or pour exercer un chantage ou plutôt pour influencer tout interventionnisme français dans la crise malienne.
Avec 6 otages coincés dans le désert, Paris ne voudrait prendre aucun risque qui mettrait leur vie en danger. Les savoir vivants et en sécurité permet d’espérer une issue heureuse. Cependant, elle annihile toute action directe de la diplomatie française au Sahel. Car les intérêts français sont les plus exposés dans cette zone sahélienne.
Tant qu’il y a un brin d’espoir de parvenir à la libération des otages, on imagine mal Paris bander ostensiblement les muscles au Sahel, comme l’a fait l’ancien président Sarkozy, lors de l’opération des forces spéciales qui a vu la mort des deux otages Antoine de Léocour et Vincent Delory enlevés aux abords de Niamey. L’approche très prudente de Paris sur le dossier malien participe de la volonté des autorités françaises de ne pas exposer davantage ses ressortissants et ses intérêts.
Pour les participants d’une intervention au Mali – Paris en fait désormais partie – il faut une bonne couverture, celle de l’ONU. Le président de l’Union Africaine (UA), Boni Yayi, lors de sa récente visite en France, a clairement parlé de cette option. Et au plan diplomatique, la France, comme en Libye et en Côte d’Ivoire, pourrait être le parrain de la résolution qui autorisera l’usage de la force pour libérer le Nord-Mali.
La question est de savoir quand la libération des otages interviendra. Avant ou pendant le coup de feu? La question des otages se présente comme un ralentisseur, une épine aux pieds des diplomates à moins que l’on ne décide de les passer par pertes et profits, toute chose inimaginable par ailleurs.
Au-delà des traditionnelles rançons réclamées ça et là pour la libération des otages, ceux-ci, à leur corps défendant, sont en train de devenir des boucliers humains aux mains des groupes armés terroristes, si on n’y prend garde. A ce petit jeu, l’intervention militaire tant souhaitée(?) ces derniers temps, pourrait arriver le plus tard possible.
Car comme dit le proverbe: « Si ton doigt est dans la bouche de quelqu’un, faut pas taper sur sa tête!«