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« SALUTE » : Film sur les poings gantés brandis au ciel, aux J.O. de Mexico 68

Des gestes qu’on n’oubliera… poings!

Le film australien « SALUTE », c’est l’histoire de 3 hommes (les Noirs américains Tommie Smith et John Carlos et l’australien Peter Norman) qui, par la magie d’une photo (l’une des plus symboliques du XXe siècle) resteront liés à jamais: trois athlètes, magnifiques et ardents, qui, au sommet de leur gloire, lors des Jeux Olympiques de Mexico, le 16 octobre 1968, firent un geste inouï pour dénoncer devant le monde entier la condition du peuple noir aux Etats-Unis.


C’est l’histoire de deux Noirs qui trouvèrent en un sportif blanc, fraternité et solidarité. L’histoire enfin d’une amitié inaltérable: 38 ans plus tard, en octobre 2006, les deux Américains avaient fait le voyage à Melbourne pour porter en terre le cercueil de leur compagnon valeureux, Peter Norman, mort d’une crise cardiaque, le 3 octobre, à 64 ans.

Les journaux de la planète annoncèrent aussitôt que venait de disparaître « le 3ème homme de Mexico ». Appellation injuste quand on sait que le temps éclair de 20’’06 qu’il avait réalisé sur 200 mètres (record à ce jour non battu en Australie) lui avait valu la 2ème marche du podium et la médaille d’argent. Mais ce fut l’occasion de ressortir la photo sulfureuse: on en avait retenu le poing brandi par les deux athlètes noirs, sans faire suffisamment attention au jeune homme blond et raide qui, en solidarité, avait épinglé sur son survêtement le badge d’un mouvement pour les droits civiques.

Pour la fédération américaine d’athlétisme, comme pour les sportifs noirs qui ont mythifié ce moment, l’Australien est pourtant devenu un héros. Aussi, quand le neveu de Peter, Matt Norman, a téléphoné de Melbourne aux deux autres protagonistes de la photo – Tommie Smith (médaille d’or) à Los Angeles et John Carlos (médaille de bronze) à Palm Springs – tous deux ont immédiatement accepté de venir enterrer leur vieux complice.

« Cela avait un sens qu’ils soient une dernière fois réunis. Ils étaient liés à vie par cette posture de Mexico et Peter partageait entièrement les convictions des deux autres sprinteurs sur l’égalité entre les hommes et la lutte contre le racisme« , raconte Matt Norman, qui vient tout juste de finir un documentaire en hommage à son oncle et a déjà filmé ensemble les trois hommes.

« Il était très croyant, issu d’une famille engagée depuis des générations dans l’Armée du salut. Et l’ostracisme dont souffraient les Noirs d’Amérique n’était pas sans lui rappeler l’affreuse condition des Aborigènes en Australie qui ont attendu jusqu’en 1967 pour être considérés comme de vrais citoyens. Peter était sensible à tout cela. Et c’est en toute conscience et fierté qu’il s’est solidarisé avec les deux Américains« , ont confirmé Tommie Smith et John Carlos lors de la cérémonie d’adieu organisée le 9 octobre 2006 dans la mairie de Williamstown, où s’étaient réunis la famille, les amis et des milliers de personnes à qui fut projetée la vidéo de Mexico. L’occasion de revenir à ce 16 octobre 1968, à la course fabuleuse qui voit s’intercaler le jeune Australien entre les deux Américains réputés invincibles, et à ces deux heures précédant la cérémonie du podium pendant lesquelles Smith et Carlos mettent au point leur coup d’éclat.

Au moment de l’hymne américain, Tommie Smith et John Carlos, sans chaussures pour signifier la pauvreté frappant les Noirs, un foulard au cou pour le premier, un collier pour le second pour évoquer les lynchages longtemps pratiqués dans le Sud, et le poing ganté brandi vers le ciel pour symboliser l’unité du peuple noir, baissent la tête. Norman regarde droit devant lui.

« Je pensais voir la peur dans son regard. Je n’y vis que de l’amour. Jamais il n’a détourné les yeux ou la tête. Jamais il n’a flanché. Vous avez perdu en lui un sacré soldat« , rappela John Carlos aux funérailles tandis que, de son côté, Tommie Smith déclara: « Norman est un grand humaniste. L’héritage de Peter est un roc. Accrochez-vous bien à ce roc« , convaincu qu’aucun athlète blanc américain n’aurait eu le cran de faire un tel geste.

Les trois hommes s’étaient revus une poignée de fois depuis 1968. Et notamment, à l’université de San José en Californie – dont Smith et Carlos sont anciens élèves – pour l’inauguration d’une statue inspirée par la scène de Mexico… mais sans le « troisième homme ».

A sa place, sur le podium, l’artiste a laissé un espace vide afin de permettre aux visiteurs de se faire prendre en photo en défendant une cause personnelle qui leur tiendrait à coeur. Peter Norman n’en a pas pris ombrage, convaincu d’avoir rallié un mouvement qui le dépassait. Fier d’en avoir été. Et désireux que les ondes créées dans ce moment fugace puissent un jour toucher d’autres consciences.

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