Citoyenneté est féminin!
Les femmes musulmanes ont pendant longtemps accepté un statut de citoyenneté derrière les hommes. Ce qui fait qu’aujourd’hui leur participation aux instances de décision, à la vie politique est plutôt faible. Pourtant ce sont elles qui mobilisent et qui élisent. L’Islam a-t-il refusé à la femme musulmane d’assumer sa citoyenneté?
La femme et la chose publique continuent de faire débat dans nos sociétés. Le Burkina ne fait pas exception. Pourtant elles font 52% de la République. Le chef, le leader a été souvent conjugué au masculin laissant ainsi très peu de place au féminin. De plus elles étaient pratiquement exclues du système scolaire qui est l’ascenseur social qui permettait de se retrouver en pôle position.
Ceci est à l’origine de la situation actuelle de la citoyenneté de la femme musulmane: elles sont faiblement représentées dans les institutions électives, les mouvements de la société civile. On les entend très peu sur des questions d’importance engageant l’avenir de la Nation. Pire celles qui s’engagent sont souvent stigmatisées. Dans ces conditions s’engager devient un sacerdoce et la cellule féminine du CERFI accepte de porter ce sacerdoce. Des femmes musulmanes qui assument leur citoyenneté ne manquent pas.
La yéménite Tawakkul Karman, membre du Conseil national de la révolution (CNR), prix Nobel de la paix en même temps que la présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, en est une illustration. Son identité de musulmane, le port du voile ne l’ont pas empêché de s’engager et comme leader. Son action citoyenne a été saluée et récompensée.
D’autres femmes musulmanes se sont engagées dans leur pays comme en Egypte, en Tunisie lors du printemps arabe. Au Maroc, Nadia Yassine se distingue par son leadership dans le mouvement « Justice et spiritualité ». Elle mène un combat pacifique mais vigoureux contre la sacralisation, au nom de l’Islam, de la royauté au Maroc entre autres.
Ces femmes musulmanes ont compris qu’au début de l’Islam, des femmes étaient de tous les combats. Asma s’est vu confier les deux chevaux qui devaient permettre au Prophète (PSL) et à son père Abou Bakr (RA) de rejoindre Médine. Le premier martyr de l’islam est une femme: Soumaya. Une musulmane a interrompu le sermon du deuxième calife, Omar Ibn Khattab, quand celui-ci a voulu limiter la dot qui prenait des proportions inquiétantes. Au lieu de la rabrouer, Omar reconnut que le femme avait raison et retira son projet de limitation du coût de la dot.
Les femmes musulmanes du Burkina ne doivent pas être en reste. Elles doivent contribuer à la gestion de la cité par leurs compétences, par leur veille sur la paix sociale, le respect des droits… Des chantiers où elles peuvent s’investir sans contredire leur référentiel islamique. Cela se fera par leur implication dans les mouvements de la société civile, les partis politiques, les ONG, les syndicats, les associations… où elles ne seront pas présentes seulement pour applaudir et servir les repas, mais surtout pour exercer un leadership féminin.
Elles doivent comprendre que la meilleure façon de faire prendre en compte la dimension féminine dans les activités et les programmes du pays passent par leur présence là où se prennent les décisions. Elles pourront ainsi, non pas contre les hommes mais avec eux, veiller à ce que les activités et programmes prennent en compte les préoccupations de l’ensemble des segments des citoyens du Burkina Faso.
Les hommes et les femmes sont condamnés à travailler ensemble. Ce qui éviterait une lutte des sexes dans laquelle le principal perdant sera la société dans son entièreté. Nous devons comprendre qu’il nous faut changer les hommes pour changer la société. Notre citoyenneté est à ce prix. Nous devons mettre en place un leadership féminin fort, efficace et dynamique pour occuper les places qui nous reviennent en tant que citoyennes à part entière. Le débat sur femme et espace public ne prendra fin que lorsque les femmes feront régulièrement mieux que les hommes dans des positions de responsabilité. Discuter de la faisabilité ne nous avancera en rien. Nous devons être sur le terrain.