Dramani doit… s’investir!
Elu en décembre avec 50,7% des voix, le président ghanéen, John Dramani Mahama, a prêté serment, le 7 janvier 2013, devant d’éminentes personnalités dont plusieurs chefs d’Etat africains. Mais cette consécration du successeur de John Atta Mills n’est ni plus ni moins qu’une investiture au goût d’inachevé.
En effet, son challenger, Nana Akufo Addo, du Nouveau parti patriotique (NPP), qui conteste son élection, a boycotté la cérémonie. Qui l’aurait cru dans un Ghana où la vitalité démocratique est mainte fois citée en exemple sur le continent noir? La raison est probablement liée au fait que la Cour suprême n’a pas encore donné son verdict sur le recours introduit par le NPP. Un recours portant pourtant sur des irrégularités estimées à environ 1,3 million de bulletins, soit environ 10% des voix, d’après l’opposition. Si ce contentieux avait été réglé, peut-être que l’on n’en serait pas là. L’opposition aurait accepté le fait accompli.
Certes, la Cour suprême n’est pas hors délai, et John Dramani Mahama n’a pas précipité non plus la date de son investiture. Chacun est dans la légalité, dans le respect des lois de la nation. Mais, on remarque qu’entre l’élection d’un président et son investiture, le délai est si court qu’il ne permet pas de vider tous les contentieux. Dans le système francophone, tant que les contentieux ne sont pas vidés, il est difficile que le président élu prête serment. Cela a l’avantage d’éviter les amalgames. Mais le système anglophone disposant autrement, il faut bien faire avec. L’essentiel est que la Cour suprême dise le droit et que chacun se conforme à la loi.
Dans tous les cas, une page est tournée et tout le mal que l’on peut souhaiter à John Dramani Mahama, est qu’il réussisse sa mission. Il prend les rênes du pouvoir dans un contexte de fracture sociale et l’on se demande s’il saura recoller les morceaux. Son élection a créé tant de tensions qu’il se doit d’oeuvrer à apaiser les coeurs, surtout le climat politique. En tout cas, s’il veut un règne moins tumultueux, il doit tendre la main à l’opposition. Cela afin d’éviter de briser la vitrine démocratique que représente, jusque-là, son pays pour le reste de l’Afrique. Il doit pouvoir faire fi des rivalités politiques.
En somme, le nouvel homme fort d’Accra ne doit pas oublier que la présidentielle qui a conduit à son élection a mis à rude épreuve la démocratie ghanéenne. Il doit, à tout prix, éviter d’être l’homme par qui le malheur arrive au Ghana. Les conséquences d’une crise postélectorale sont si dramatiques qu’il vaut mieux les prévenir que de chercher à les résoudre. Le Ghana est considéré aujourd’hui comme l’un des pays africains où les institutions sont assez fortes et crédibles, où l’économie respire plus ou moins à deux poumons, où les valeurs traditionnelles constituent une véritable charpente pour l’équilibre de la société.
Et la lourde mission revient au quinquagénaire dont l’investiture a été l’une des moins élégantes, d’être plus élégant dans ses actions pour renforcer ces acquis, obtenus aux prix de mille efforts par ses devanciers. Et dans cette perspective, l’opposition doit faire l’effort d’accepter le dialogue, l’unité que prône John Dramani Mahama pour l’intérêt supérieur de la nation.