Cancan de la Can!
Juste un an de repos, la crème du football africain se retrouve une fois de plus pour fêter ses grands talents. Le coup d’envoi de la grande messe sera donnée ce samedi 19 janvier en Afrique du Sud pour la CAN 2013. Deux confrontations seront au rendez-vous. Il s’agit d’Afrique du Sud-Cap vert et Maroc versus Angola.
En Afrique, le football est encore purisme, génie, plaisir, liberté et… passion. Il fut un temps où nous étions dans le folklore, dans les clichés, dans les lieux communs. Pas tellement la faute de nous autres journalistes africains mais plutôt du côté de toute cette faune (eh oui, la faune est aussi occidentale) qui débarquait en Afrique et à la CAN comme si elle partait en Safari.
Il y a les journalistes, bien sûr, mais aussi cette armée de fauves-recruteurs (eh oui, il y a aussi des animaux sauvages en Europe), souvent sans scrupules qui venaient faire leur marché dans leurs anciennes colonies. Que de clubs et que de joueurs arnaqués; que de bonnes affaires pour les clubs français avec les Salif Keïta, Pokou, M’Pelé, Tokoto et des dizaines d’autres que nous oublions et qui ont fait la gloire et la fortune des clubs de la Métropole.
C’est vrai que le phénomène s’est atténué, mais il est loin d’avoir disparu. Entre dirigeants de clubs africains véreux, faux et vrais agents et joueurs qui rêvent de milliards et d’une vie meilleure, c’est toute la réalité d’un milieu impitoyable qu’on retrouve. Certains parviennent à y échapper et à faire leur trou, tels Abedi Pelé, Weah, Eto’o, Drogba, Adebayor… Peu, très peu, mais ça viendra.
La CAN n’a pas changé qu’en ça. Elle a aussi épousé le modèle européen, les stratégies réalistes et le tacticisme exacerbé. Plus de calculs, moins de spontanéité n’ôteront probablement jamais au joueur africain sa folie, sa créativité, son art inné du dribble, son génie. Sur ce point précis, il y a quelques années encore, la référence c’était le Brésil. Aujourd’hui, à part quelques très rares exceptions près, ce n’est plus le cas.
A la CAN, on en voit parfois des vertes et pas mûres (surtout nous autres pauvres journalistes) mais on en voit aussi –heureusement– de bien belles. On voit des dribbles qu’on ne voit nulle part ailleurs, des gestes techniques à vous couper le souffle, une joie de jouer qu’on ne retrouve que chez… Barcelone. Et des couleurs, beaucoup de couleurs. Celle des maillots, des gens, des villes et des villages qu’on traverse, les échoppes, les étalages, les petits marchés sauvages… L’art aussi car on en parle peu mais l’Afrique c’est aussi l’art, sous toutes ses formes. L’art dans la rue, l’art à portée de main, l’art à la portée de toutes les bourses, l’art sur les… pelouses vertes.
L’Afrique bouge, change et avance. Tenez, il n’y a pas si longtemps, l’arbitrage était la honte de l’Afrique, pointé du doigt, qui vous pourrit un match et fait balancer une rencontre.
Ce n’est presque plus le cas aujourd’hui. Un gros travail a été fait sur ce plan et, nous Tunisiens précisément, nous pouvons être fiers d’avoir pour patron des hommes en noir à la CAF un compatriote, Tarak Bouchammaoui. Un véritable combat qu’il mène pour rétablir l’honneur perdu des arbitres. Presque plus de sifflets scandaleux, de résultats connus d’avance et de partis pris révoltants.
Le Ghana et la Côte d’Ivoire, c’est, certes du solide, mais ce n’est pas de l’intouchable. Faut-il rappeler que la hiérarchie continentale s’accélère, que les «petits» se sont révoltés ces dernières années? Faut-il aussi rappeler que la Zambie est, contre toute attente, le vainqueur de la dernière édition?
Disparus le Cameroun et l’Egypte; le Nigéria n’est plus ce qu’il était, en même temps qu’on redécouvre et qu’on découvre l’Ethiopie, le Cap Vert, le Togo et le Niger. Il y a de la fronde en l’air et ce n’est pas pour nous déplaire. La CAN ne sera pas triste.