Tous vers l’A-fric!
L’Afrique est le nouvel eldorado des compagnies aériennes. Les compagnies européennes et celles des pays du Golfe se disputent le marché au moment où les transporteurs locaux, très affaiblis, peinent à émerger.
Le transport aérien en Afrique est en constante progression depuis des décennies, entre 4 et 5% par an. Le continent africain représente 15% du chiffre d’affaires de la compagnie aérienne Air France, selon Etienne Rachou, directeur délégué international du groupe Air France-KLM, qui a du mal à se maintenir en Afrique, comptant développer de nouveaux services dans des pays africains comme le Sénégal.
«Air France sans l’Afrique ce n’est pas vraiment Air France. L’Afrique est dans nos gènes», précise M. Rachou, lors de la célébration des 50 ans de la ligne Paris–Dakar. Le pouvoir d’achat des 5 millions de passagers transportés par le groupe franco-hollandais Air France-KLM en Afrique est particulièrement élevé puisqu’aujourd’hui, ce continent représente un tiers des escales dans le monde desservies par des avions équipés de première classe.
A titre indicatif, un billet Paris–Dakar coûte ainsi près de 6.000 euros. Avec Johannesburg, c’est la deuxième destination (après New York) où vole le vaisseau amiral, l’Airbus A380. Il ajoutera que «les aéroports africains sont en train de se mettre à niveau par rapport aux exigences internationales. C’est à l’image du Sénégal avec l’aéroport de Dakar et en plus de celui en construction à Diass. Le Sénégal est un exemple dans ce domaine et c’est l’un des pays, comme la Côte d’Ivoire, que nous desservons le plus».
Selon lui, la ligne de Dakar, avec des vols quotidiens, enregistre près de 180.000 passagers par an. Par ailleurs, Air France mise sur un partenariat fort avec les compagnies nationales comme c’est le cas avec Kenya Airways, la compagnie d’Angola.
A ce propos, Pierre Descazeaux, directeur général Afrique et Moyenne Orient d’Air France, affirmera: «Nous sommes en discussion avec Air Ivoire. Et le groupe est «à la disposition de Senegal Airlines pour toute forme de partenariat ou de transfert de compétences».
Le groupe Lufthansa déploie ses filiales Brussels Airlines et Swiss sur les destinations francophones, le pré carré d’Air France. Pour un passager au départ de Lyon, Marseille, Nice, Toulouse, etc., voler vers l’Afrique avec une correspondance à Bruxelles, Francfort ou Zurich au lieu de Paris ou Amsterdam revient sensiblement au même.
Autres intervenants, les compagnies ibériques TAP Air Portugal et Iberia (en cours de fusion avec British Airways) glanent des parts de marché. À cette concurrence Nord-Sud s’ajoute une offensive venue de l’Est, plus précisément du Moyen-Orient. Emirates et, dans une moindre mesure, Etihad, s’attaquent aux marchés de l’Afrique proches des hubs de Dubaï et d’Abu Dhabi, mais aussi aux destinations de l’ancienne Afrique occidentale française, le fief d’Air France. Les passagers visés ne sont pas les Emiratis mais les Chinois et les Indiens, à qui l’on offre un voyage plus court en passant par les hubs du Golfe plutôt que par Roissy-CDG ou Francfort. Emirates vient de nommer responsable de l’Afrique Jean-Luc Grillet, un très fin stratège du transport aérien qui a terminé sa carrière en France par la mise en service de l’Airbus A380 entre Dubaï et Paris.
Enfin, à l’Ouest, les compagnies américaines retournent également sur le marché africain avec l’arrivée de Delta à Dakar et d’United dans d’autres aéroports du continent. Pour Air France et ses collègues européennes, les passagers empruntent un vol direct (de plus moins cher) au lieu de passer par Paris.
S’agissant des compagnies africaines, le premier transporteur aérien est Royal Air Maroc. Ses avions rassemblent les passagers des grandes villes européennes vers son hub de Casablanca. Ils en repartent après une courte correspondance vers les capitales africaines, parfois deux fois par jour, comme pour Dakar. Sur cette destination à 500.000 passagers par an, Air France en revendique 180.000, à peu près autant que la RAM qui séduit les passagers moins pressés à petit budget.
La concurrence des compagnies locales reste faible. Toutes renaissent plus ou moins des cendres d’Air Afrique disparue il y a dix ans. Air Ivoire s’est éteinte récemment dans le cadre de la crise récente, mais Air France propose d’aider à la remise en service d’un transporteur régional.
En Mauritanie comme au Gabon, la remise en ordre est nécessaire. Senegal Airlines, qui a démarré au début de l’année, devrait recevoir bientôt un 3ème Airbus A320 permettant notamment d’assurer deux fois par jour Dakar–Abidjan, une des liaisons les plus rentables de la région. En attendant de mettre en service à l’été 2012 un long courrier A330 pour desservir l’Europe, Senegal Airlines a conclu un accord commercial avec SN Brussels et Emirates, fermant la porte à Air France.
L’autre concurrent est le transporteur national d’Afrique du Sud, South African Airways (SAA), qui vient de commander 25 nouveaux avions pour conquérir le marché africain à son tour.
(Vidéo)
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