En vision gratuite sur la web-tv de la chaîne de télévision francophone TV5 Monde.
La chaîne de télévision francophone TV5 Monde a diffusé sur son signal Afrique une série de 7 épisodes intitulée » Les Rois de Ségou » – que l’on peut visionner gratuitement sur la web-tv de la chaîne.
Cette saga historique, volontairement simplifiée pour toucher un large public, plonge le spectateur dans l’univers du royaume bambara, qui domina l’actuel Mali du milieu du 17e au 19e siècle. Une société où se mêlent conquêtes et luttes de pouvoir mais aussi code de l’honneur et savoir vivre des Bamanans.
Mieux faire connaître le royaume bambara de Ségou, beaucoup de cinéastes en rêvaient. Le réalisateur malien Boubacar Sidibé nous fait revivre cette page d’histoire qui fait la fierté du Mali, dans une série de sept épisodes (7 x 78′) diffusés sur la chaîne de télévision francophone TV5 Monde.
Outre des archives, le cinéaste a consulté des historiens et des traditionnistes pour établir son scénario, qui brosse à grands traits une société où se mêlent conquêtes et luttes de pouvoir mais aussi code de l’honneur et savoir vivre des Bamanans.
Cette saga historique met en scène ses principales figures, de Biton Coulibaly à Ngolo Diarra, et ses fils, Monzon et Dah. Aucune date ne soutient le récit qui tient pourtant le spectateur en haleine de bout en bout.
On peut situer le premier épisode de la série vers 1715. Le royaume est alors à l’état d’embryon, instable, en proie à d’incessantes querelles entre chefs de villages. La population, cible des brigands et autres marchands d’esclaves, est défendue vaille que vaille par les chasseurs-soldats. Le film commence quand les notables décident d’unir leurs forces en se désignant un chef, en l’occurrence Mamari Coulibaly, un chasseur aguerri qui a prêté allégeance à leur «ton» (association des hommes d’une même classe d’âge), et surnommé Biton (fils du ton).
Pour asseoir son autorité, Biton Coulibaly exige de gouverner sans l’avis du Conseil des anciens. Il lève un impôt obligatoire pour entretenir ses guerriers, chargés expressément de protéger la population et n’hésite pas à lancer son armée contre les insoumis. Cela n’est évidemment pas du goût de tous. Son armée de métier, composée de volontaires (tondjons), s’enrichit peu à peu des captifs de guerre, puis de tous ceux qui n’arrivent plus payer l’impôt… Est-ce le prix à payer pour bâtir un royaume? Quoi qu’il en soit, certains font tout pour contrer l’autorité croissante du bon Biton, contraint de punir de plus en plus sévèrement ses opposants, en particulier ceux qui osent dire qu’il existe des esclaves à Ségou.
De vengeance en vengeance, Biton veut attaquer Binaba, le roi de Ngolokunam qui l’a défié pour venger son frère. Mais son griot, Djeli Sankoï Koïta, tempère ses ardeurs et conseille le compromis.
On découvre le rôle essentiel du griot royal, constamment éclairé dans ce film. Le « djeli » n’a rien d’un laudateur du puissant mais apparaît plutôt comme le conseiller le plus influent, son garde-fou et son ambassadeur (son double) sans qui le roi ne saurait gouverner.
Mythes fondateurs et sortilèges sont bien sûr au rendez-vous dans cette épopée somme toute réussie. Entre autres, la légende de la fondation du royaume, quand Biton surprend le génie du fleuve en train de voler la récolte dans son champ et qu’il lui laisse la vie sauve. En guise de récompense, le génie lui met une goutte de lait dans chaque oreille, ce qui lui permet d’entendre tous les complots ourdis contre lui… Il régnera ainsi pendant 43 ans.
Le rôle des féticheurs et des marabouts est aussi magnifié. Notamment leurs prédictions répétées concernant le jeune Ngolo Diarra, qui de l’avis de tous est un futur roi – au grand dam de son père adoptif puis de Biton lui-même, qui rêve de voir un de ses trois fils lui succéder sur le trône.
L’univers de cette coproduction (Brico Films, Office de la radio télévision du Mali et Sarama Films – 220 millions de F CFA) ressemble à s’y méprendre à celui des villages sahéliens d’aujourd’hui avec leurs concessions en banco. Rien d’étonnant puisqu’elle a été tournée en 2010 pendant dix semaines, d’abord dans la forêt classée de Tienfala, à 5 kilomètres de Bamako, puis à 200 kilomètres à l’est, en bordure du fleuve Niger, dans le village de N’Gama, près de Ségou. Les costumes aussi, très soignés, notamment ceux de la cour royale où toutes sortes de bogolan ont été mis à l’honneur. Tout comme les bijoux.
Quant au récit, il est soutenu par des comédiens maliens souvent de grande qualité, qui ont su rendre attachants les personnages. Au total, quelque 250 comédiens et figurants ont été requis pour cette série – un nombre qui paraît parfois insuffisant pour rendre compte de la grandeur de cette cité restée plus vaste et plus peuplée (à tort ?) dans notre imaginaire.
Autre regret: le réalisateur n’a pas abordé – ce sera peut-être le cas dans une prochaine saison – les relations notoirement conflictuelles entre le Royaume bambara et le Macina, dans la boucle du Niger, où Sekou Hamadou*, un roi musulman, lutta férocement contre les rois animistes de Ségou avant d’établir en 1818 l’Empire théocratique peul du Macina. C’est aussi un Peul, le Toucouleur El Hadj Oumar Tall, qui, en 1861, s’empara de la riche cité ségovienne, mettant fin à des dynasties aux destins contrastés.
LES EPISODES:
1. La révolte des Bamanans.
2. L’esclave du Ton.
3. L’héritier de Biton.
4. La bague du poisson.
5. La rivalité des princes.
6. Le viol de l’esclave.
7. La lutte pour le pouvoir.
(* Vie et enseignement de Tierno Bokar, le sage de Bandiagara, par Amadou-Hampaté Bâ. Paris, Le Seuil, 1980. 254 p.)
Mamadou Camara