Africhine!
Elle rappelle à bien des égards une jeune fille courtisée de toutes parts pour ses charmes. Elle, c’est l’Afrique qui, depuis quelques années maintenant, est le lieu des rivalités économiques et commerciales entre les grandes puissances.
Comme elle le fut au milieu du 19e siècle entre nations industrielles européennes à la recherche de matières premières et de débouchés commerciaux.
Pouvait-il en être autrement à l’heure de la mondialisation où le continent noir constitue le pôle de croissance le plus dynamique de la planète de surcroît adossé à des ressources naturelles aussi abondantes que variées? Bien sûr que non!
D’où ce véritable chassé-croisé entre les puissances quand elles ne se rencontrent pas au même moment sur le terrain africain. Dernier exemple en date de cet attrait pour l’eldorado africain, le voyage du Premier ministre chinois, Li Keqiang, qui, hasard de calendrier ou simple coïncidence, a débuté en Ethiopie (Il se rendra ensuite au Nigeria, en Angola et au Kenya) au moment où le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, achevait une tournée qui l’a conduit en Ethiopie, en RDC et en Angola.
Alors «goodbye mister» John, «huànying nin» (1) Li. L’Aigle s’envole, et le Dragon atterrit ! Ainsi peut-on s’exclamer dans les capitales éthiopienne et angolaise où, en l’espace d’une semaine, on aura accueilli deux hautes personnalités américaine et chinoise, chacune venue «se pencher sur le berceau de l’humanité» dans le secret espoir de s’assurer ses faveurs.
Cependant, force est de reconnaître que même si l’objectif est le même, l’approche diffère entre l’Aigle américain et le Dragon chinois. En effet, les Américains, eux, n’hésitent pas à s’inviter dans le politique en exigeant, entre autres, le respect des droits de l’homme, de la liberté d’expression et des règles démocratiques, au risque, parfois, de froisser la susceptibilité de leurs vis-à-vis.
Quant aux Chinois, fidèles à leur principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d’un ami, ils s’en tapent de nos préoccupations domestiques. L’Empire du milieu a, au moins, le mérite d’être sincère sur ses intentions réelles et donc se garde de s’embarquer dans des considérations politiques qu’il ne maîtrise pas toujours.
Le bois, le pétrole, l’or, le diamant et autres fruits des entrailles africaines n’ont pas d’odeur politique pour un Dragon à la recherche de pitance. Et ce n’est certainement pas à Pékin qu’un opposant en manque d’alternance ira se plaindre.
Nos infortunes politiques ne sauraient émouvoir des hommes qui ont connu peut-être pire, comme la dictature de Mao, la chape de plomb de la Révolution culturelle ou la sanglante répression de Tiananmen. Un réalisme cynique qui opère auprès de bien de nos roitelets qu’arrange l’indifférence du Dragon.
(1) Bienvenue En Chinois.