Uemoa en émois!
Les chefs d’Etat et de gouvernement des 8 pays membres de l’Union économique et monétaire ouest- africaine (UEMOA) se sont réunis, mercredi 6 juin 2012 à Lomé au Togo, afin d’examiner la situation de l’Union lors de leur 16e sommet ordinaire. Economiquement, l’UEMOA se porte bien en 2012 avec une croissance de 6% en perspective, mais politiquement, la zone est très fragilisée par les crises politiques qui secouent la Guinée-Bissau et surtout le Mali.
Contrairement à 2011, les perspectives économiques dans la zone Franc ouest-africaine sont bonnes, avec un taux de croissance de l’UEMOA en 2012 qui sera de l’ordre de 6% contre seulement 1% en 2011. Cette reprise qui suit celle de 2010 (+4,5%) sera portée par le retour de la croissance en Côte d’Ivoire (8%) après des années sombres et par les progrès attendus dans les secteurs des mines et du pétrole.
Sur le plan politico-institutionnel, la mise en œuvre des réformes communautaires et l’exécution des programmes régionaux notamment le Programme Economique Régional (PER) et l’initiative régionale sur l’énergie ont permis d’améliorer sensiblement les acquis de l’intégration régionale et de l’économie.
Mais les bonnes perspectives économiques pourraient ralentir si jamais la campagne agricole connaissait le même sort que celle de l’année dernière. En effet, au cours de ce sommet, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UEMOA ont examiné un rapport présenté par le président nigérien Issoufou Mahamadou sur la crise alimentaire, d’où il ressort que la campagne agricole 2011/2012 a été décevante notamment dans les pays sahéliens de l’UEMOA (Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal) où la production a baissé de 18%. Cette situation expose un quart des 80,34 millions des habitants de l’Union à la crise alimentaire.
Pour les dirigeants de l’UEMOA, il faut dès maintenant mettre en œuvre les recommandations issues du sommet de l’Union africaine à Maputo en 2003 visant à consacrer 10% minimum des budgets des Etats au développement de l’agriculture.
«Le secteur agricole occupe une part très faible dans les budgets. Un pays comme le Niger consacre moins de 2% de son budget à l’agriculture. C’est pourquoi, le sommet a demandé de prendre des décisions pour que le secteur agricole soit mieux doté. Nous avons un potentiel extrêmement très important dans nos pays en matière de terre arable, d’eau de surface et de sous-sol qui peuvent permettre à l’ensemble de nos pays de nourrir l’ensemble de leurs populations», a déclaré M. Issoufou.
Les chefs d’Etat qui ont adopté ce rapport ont estimé qu’il était urgent de relancer de façon vigoureuse l’économie sous-régionale. Au regard de «la nécessité d’assurer, de façon permanente, la sécurité alimentaire des populations, la Conférence des chefs d’Etat a instruit le conseil des ministres, les organes et les institutions communautaires de mettre en œuvre les recommandations du Rapport (établi) sous l’égide du président Issoufou Mahamadou», a indiqué le communiqué final.
Mais les crises bissau-guinéenne et malienne auront davantage préoccupé les dirigeants de l’UEMOA. Sur la Guinée-Bissau, tout en condamnant le coup de force qui a mis fin au processus électoral, les dirigeants de la zone Franc ont appelé au respect de l’ordre constitutionnel dans ce pays membre, exhortant la classe politique bissau-guinéenne à tout mettre en œuvre pour préserver les acquis démocratiques, la paix et la cohésion sociale.
Quant au Mali qui a fait l’objet d’un mini-sommet (lire papier page suivante), les dirigeants ont salué les progrès réalisés dans le processus de normalisation politique sous l’égide du Président du Faso, Blaise Compaoré, médiateur dans cette crise au compte de l’Afrique de l’Ouest, exhortant les «hautes» autorités de la transition et tous les autres acteurs à tout mettre en œuvre pour un retour rapide de la paix dans le nord du Mali et la restauration de l’intégrité territoriale de ce pays.
Le directeur général de l’ONUSIDA, le malien Michel Sidibé, invité spécial, a fait un plaidoyer émouvant en faveur de la prise en charge du VIH/Sida en Afrique et particulièrement dans la zone Franc, exhortant les Africains à nouer des partenariats avec les pays émergents (Inde, Chine, Brésil) pour la production de médicaments en Afrique contre le Sida, M. Sidibé a surtout plaidé en faveur de la prise en charge de la transmission mère-enfant.
Le nouveau président sénégalais, Macky Sall, qui faisait son baptême de feu, a été chaleureusement accueilli et applaudi par ses pairs. Preuve de la confiance que lui font ses pairs, M. Sall a été désigné pour conduire les travaux du Comité de haut niveau devant permettre à l’UEMOA de faire une importante mue en intégrant dans les questions économiques, des questions politiques.
Les dirigeants de la zone Franc ouest-africaine ont également décidé enfin d’accorder un second mandat au président togolais. Faure Gnassingbé dirigera l’UEMOA jusqu’au prochain sommet dont la date n’a pas été fixée.
Romaric Ollo HIEN