Lancer une webTV en Afrique, c’est encore osé. En imaginer une qui soit consacrée aux jeunes qui innovent et réussissent dans le monde agricole, c’est un pari.
Faire de ce projet le premier média conçu pour le mobile et les réseaux sociaux en Afrique de l’Ouest, c’est le défi que lance Inoussa Maïga. Ce fils d’éleveur, né dans un petit village du Burkina Faso, est à l’origine de l’un des projets les plus excitants du moment en matière d’innovation média en Afrique.
Inoussa Maiga est né dans un petit village de l’est d’un pays, Fada N’Gourma. Inoussa sera le seul parmi ses frères et soeurs à faire des études. Son père aurait préféré le voir courir derrière le troupeau, mais sa mère s’est arrangée pour qu’il aille en classe. Son ambition remonte loin dans son histoire personnelle et ses racines. L’enfant s’est forgé un caractère. L’adulte en conservera une profonde détermination et l’envie d’aller au bout de ses idées. Après l’école primaire, ce sera le lycée puis l’université de Ouagadougou en 2005. Dans l’intervalle, Thomas Sankara, le président rebelle du « pays des hommes intègres » est assassiné. Blaise Comparé s’installe au pouvoir pour 27 ans de régime autoritaire. La vie de la capitale est rythmée tous les deux ans par le Fespaco (Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou) qui vient projeter les films du continent dans les cinémas de la capitale.
Au sortir de ses études, Inoussa décide alors qu’il sera journaliste. Mais ce n’est pas le travail au sein des rédactions qui le fait rêver, ni la course à cette information tellement institutionnelle qui encombre les pages des journaux burkinabè comme ceux de toute l’Afrique francophone. Non. Lui, sa décision est prise, c’est l’agriculture et le monde rural qui seront son terrain de reportage et son champ d’investigation.
Avec la même assurance et apparente facilité que le cultivateur qui récolte le sorgho, Inoussa décroche un master de recherche en sciences de l’information et de la communication et une maitrise en communication pour le développement.
Sur sa lancée, il s’inscrit au master international en management des médias proposé par l’ESJ à Lille. L’enseignement se fait à distance, mais il en faudrait plus pour le décourager, même si, au début de la décennie 2010, il faut plus de temps pour mettre une image en ligne que pour boire une Brakina, la bière locale. Inoussa obtiendra une mention très bien.
Un peu plus tard, alors qu’il travaille dans une société de production audiovisuelle, Inoussa décide de lancer un blog consacré à l’agriculture. Entre les coupures de courant, plus agaçantes encore que les piqures de moustique à la tombée de la nuit, le journaliste met en ligne ses reportages réalisés chez les cultivateurs ou les éleveurs au Burkina et dans toute l’Afrique de l’Ouest. Les paysans qu’il vient interroger ne comprennent pas vraiment pour quel média il travaille.
Un cultivateur nigerian lui fait expliquer en détail son activité. Après avoir écouté Inoussa parler d’internet, du web, des ordinateurs, des blogs, il s’exclame finalement: « Ah, tu es un Googol farmer, alors ! ». Googol farmer, ce sera donc le nom de son blog désormais.
A la tête d’une société de production audiovisuelle, Inoussa Maïga produit des reportages sur des zones rarement couvertes par les médias.
Ce blog va lui servir de visa et lui permettre de parcourir le monde et d’etre repéré par les organisations internationales engagées dans le développement de l’agriculture africaine.
Le nouveau projet d’Inoussa Maiga s’appelle AgribusinessTV et il s’adresse à un public jeune. L’un des défis du projet, c’est de produire des vidéos qui circuleront de téléphone portable en téléphone portable via Facebook ou bien échangées par bluetooth quand la connexion fait défaut. A ma connaissance, ce sera le premier média d’Afrique de l’Ouest conçu spécifiquement pour le téléphone mobile. Lancer cette webTV est devenu une sorte d’évidence pour la dizaine de professionnels réunis par Inoussa Maïga.
Le projet va démarrer avec des journalistes basés dans 4 pays: Burkina Faso, Côté d’Ivoire, Cameroun et Bénin.
♦ Selay Marius Kouassi (journaliste multimédia en Côte d’Ivoire)
♦ Anne Mireille Kzouangeu (Journaliste reporter d’images au Cameroun)
♦ Augustin Laourou (Journaliste reporter d’images au Bénin)
♦ Moussa Traoré (Journaliste reporter d’images au Burkina Faso)
♦ Nourou-dhine Salouka (Journaliste reporter d’images au Burkina Faso)
♦ Mahamadi Ouédroago (Journaliste reporter d’images au Burkina Faso)
Dans cette équipe, il faut encore ajouter Nawsheen Hosenally. Née sur l’île Maurice, elle est maintenant installée à Ouagadougou après quelques années passées aux Pays-Bas à travailler pour le CTA. Mariée avec Inoussa Maïga à la ville, elle se chargera de développer l’audience de la webTV sur les réseaux sociaux et de traduire l’ensemble des contenus en anglais.
C’est ici que se situe l’enjeu essentiel pour un continent qui va devoir nourrir une population qui va doubler sur le continent entre 2006 et 2050. La mission centrale d’AgriBusinessTV est là. Montrer qu’on peut innover dans le domaine de l’agriculture et de l’élevage. Montrer aussi qu’on peut en vivre bien.de 5 à 7.