Mais on n’avait pas dit qu’il était mort?
«Vérité, mensonge ou manipulation?»* Ainsi interrogeait-on lorsque, avec une fanfaronnade à nulle autre pareille, l’armée nigériane annonçait la mort du chef de guerre de Boko Haram, le redoutable Abubakar Shekau.
«Vérité, mensonge ou manipulation?»* Ainsi interrogeait-on lorsque, avec une fanfaronnade à nulle autre pareille, l’armée nigériane annonçait la mort du chef de guerre de Boko Haram, le redoutable Abubakar Shekau. Du reste, on l’avait dit, ce n’est pas la première fois que cet homme a été déclaré mort avant qu’il ne réapparaisse, comme un feu follet, à la surprise générale, rabattant ainsi le caquet à ses contempteurs qui ne veulent pas le voir même en peinture.
Pour une humiliation, c’en est une pour l’armée nigériane
Déjà en 2009, puis en 2013, la mort d’Abubakar Shekau avait été annoncée par l’armée et la police, avant d’être démentie. En tout cas, tous ceux qui avaient vite fait d’applaudir la mort d’Abubakar Shekau doivent sans doute être dans leurs petits souliers.
Car dans une vidéo de 36 minutes, l’homme déclare être vivant et dit diriger un califat établi sur les villes tombées sous le contrôle de Boko Haram. «Me voilà, en vie. Je ne mourrai que le jour où Allah m’ôtera le souffle», a-t-il lancé avant d’ajouter: «Certains se demandent si Shekau a deux âmes. Non, je n’en ai qu’une, au nom d’Allah». Pour une humiliation, c’en est une pour l’armée nigériane qui, jusque-là, donne l’impression d’avoir plié l’échine devant la secte islamiste qui conquiert sans coup férir, les unes après les autres, les villes du Nord.
C’est peu de dire que depuis un certain temps, les populations du Nord Nigeria vivent la peur au ventre, elles qui, fort désabusées, ne savent plus qui de l’armée nigériane ou de Boko Haram vaut mieux que l’autre.
Car, on le sait, et des ONG de défense des droits de l’Homme l’ont confirmé, l’armée nigériane, dans sa prétention à combattre Boko Haram, a commis plusieurs exactions à l’encontre des populations, si fait que ces dernières ne croient plus en elle. Mieux, l’armée incarne à leurs yeux le mal, tout comme Boko Haram qui les réprime, viole et tue.
Ce que l’on attend de l’armée nigériane, c’est beaucoup
moins de paroles que la libération des lycéennes
Cela dit, l’armée nigériane a toujours du pain sur la planche. Car Abubakar Shekau qui lui donne du fil à retordre, dit être en vie. C’est sa parole contre celle de l’armée nigériane. Qui croire?
Qui dit vrai ? Toutefois, on est tenté de croire à Abubakar Shekau, puisque lui au moins a eu le mérite de se présenter physiquement dans une vidéo, même s’il est vrai que l’authenticité de l’enregistrement peut être sujette à caution.
L’armée nigériane, quant à elle, s’est seulement contentée d’annoncer la mort d’un ennemi recherché, sans aucune preuve matérielle.
On se rappelle qu’après la mort du prédécesseur d’Abubakar Shekau, le scalp de Muhammed Yussef avait été brandi comme un trophée de guerre par l’armée nigériane, si fait que Boko Haram n’avait pas eu d’autre choix que de confirmer la mort de son leader d’alors.
Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait avec Abubakar Shekau, si tant est qu’elle ait eu la peau de ce dernier? De toute évidence, ce que l’on attend de l’armée nigériane, c’est beaucoup moins de paroles que la libération des deux cents lycéennes détenues depuis plus de quatre mois dans un endroit jusque-là tenu secret.
Lire aussi)