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BURKINA FASO: Transition politique – Blaise Compaoré lance un défi aux nouvelles autorités politiques!

Attention à ne pas se faire chiper la révolution! 

«Ils voulaient que je parte, je suis parti. Si le pays va mieux, et c’est tout ce qui m’importe, ils auraient eu raison. L’Histoire nous le dira», a prévenu Blaise Compaoré dans les colonnes de Jeune Afrique N°2809 paru du 9 au 15 novembre 2014.

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«Ils voulaient que je parte, je suis parti. Si le pays va mieux, et c’est tout ce qui m’importe, ils auraient eu raison. L’Histoire nous le dira», a prévenu Blaise Compaoré dans les colonnes de Jeune Afrique N°2809 paru du 9 au 15 novembre 2014.Les propos doux-amers de l’ancien chef de l’Etat burkinabè sonnent comme un délit de parjure puisque, personne n’a «voulu» que le président du Faso «parte» du pouvoir ! Non. Le peuple lui a simplement demandé de mettre fin à la mise en place d’un Sénat onéreux et inopportun et surtout de retirer «son» projet de modification de l’article 37 de la Constitution…

«Le devoir sacré du respect de la Constitution», a rappelé avec insistance le président du Faso, Michel Kafando, lors de la cérémonie de passation des charges le 21 novembre 2014 à Ouagadougou! «Il n’est pas de plus grande sagesse, de marque plus évidente de sens de l’Etat que de savoir, le moment venu, passer le flambeau à la génération suivante. Les gouvernants ne devraient pas manipuler ou modifier la Constitution pour se maintenir au pouvoir au-delà des mandats prescrits qu’ils ont acceptés lorsqu’ils ont pris leur fonction», a fulminé Kofi Annan, lors d’un Sommet de l’Unité africaine en 2004 à Addis Abeba.

«Cette forfaiture», pour reprendre le mot-symbole du Premier ministre, Yacouba Isaac Zida, prononcé le 16 novembre 2014 à Ouagadougou à l’occasion de la signature historique de la Charte politique de la Transition, a valu ainsi au peuple burkinabè de «payer, relèvera avec pertinence Michel Kafando, le prix des errements et l’aveuglement d’un système qui, jusqu’à l’entêtement, a refusé de regarder la réalité en face».

En refusant le «moins», Blaise Compaoré a dû devoir réaliser le «plus»: c’est-à-dire perdre tout, y compris le pouvoir. «Désormais les hommes politiques feraient mieux d’écouter la voix du peuple», a assené le chef du Gouvernement. Les marxistes nous enseignent que «Les lois de l’histoire sont plus fortes que les appareils bureaucratiques».

Le régime de Blaise Compaoré étant maintenant déchu, il faut que les Burkinabè inventent impérativement une nouvelle mentalité, une nouvelle génération de personnel politique portée à l’écoute de nos détresses quotidiennes. Et les défis sont nombreux.

En effet, a indiqué le chef du Gouvernement, «une chose est d’avoir chassé Blaise Compaoré du pouvoir par une insurrection populaire, mais une autre est de travailler à sortir de l’instabilité dans le cadre d’une transition apaisée, à même de conduire notre pays vers des élections démocratiques, transparentes, libres et justes». Après donc le droit à la contestation du pouvoir déchu, les Burkinabè doivent passer à présent au droit à l’obéissance du pouvoir-nouveau.

Relevons le défi lancé par le régime Compaoré!

Mettons-nous rapidement au travail afin de ne pas être victimes de notre courage surhumain des 30 et 31 octobre 2014. Certes, il se trouverait toujours des Burkinabè à l’esprit retors qui prieront à l’intérieur de leurs cases lugubres pour que le train de la Transition politique si attrayante reste sur les rails ! Nous devons manifester notre désir de reconstruire ensemble un Etat nouveau et une conscience politique nouvelle. Les nouvelles autorités politiques de la Transition doivent offrir aux Burkinabè une société confiante en son avenir, consciente en son passé car il serait trompeur, bien trompeur de croire qu’il nous est possible d’équilibrer le présent et de préparer l’avenir sans se souvenir du passé, fut-il douloureux.

Cultivons la cohésion et la justice sociale et tavaillons au retour de la paix. Gardons à l’esprit que toute l’activité de l’Etat sert à la réalisation durable du bien commun qui est la fin et la règle de l’Etat. Peuple du Burkina, ensemble, mettons-nous au travail et réussissons cette parenthèse politique chargée de symboles forts ! Mettons-nous au travail comme nous avons su si bien le faire sous le régime déchu. Pendant 27 ans, des hommes et des femmes ont été spoliés et vampirisés ; pendant 27 ans un certain personnel de l’administration publique a été délibérément clochardisé et vidé de sa dignité ; pendant 27 ans, le régime a exalté la culture des médiocres qui, propulsés au cœur de la décision, narguaient les pestiférés de la République. Nous avons souffert dans le silence.

Oui, «l’égoïsme, l’arrogance, la rapacité et la méchanceté de certains des filles et fils du Burkina égarés avaient, a dénoncé le Premier ministre, Yacouba Zida, dangereusement et misérablement» ouvert des «fissures» dans les cœurs des Burkinabè que l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014 a fort heureusement pansées rapidement.

L’«idéal prôné par la Révolution de 1983» a été dévoyé, a regretté le nouveau président du Faso. Celui-ci a ajouté avec consternation : «En lieu et place, trente ans après, nous assistons à un saut qualitatif et surtout quantitatif brusque, pourvoyeur de richesses inexpliquées, de privilèges indus, d’avantages oligarchiques». Michel Kafando a pris un engagement fort devant l’Histoire : «Nous règlerons bientôt les comptes à ceux qui pensent qu’ils peuvent impunément dilapider les deniers publics . Nous avons les yeux ouverts».

Des ressources limitées

Le Burkina est un pays aux ressources limitées. Aussi, le recentrage et la diminution du nombre de portefeuilles ministériels (25) rendus publics, le 23 novembre 2014, relève de la realpolitik. L’heureuse conséquence de cette approche économiquement pragmatique sera le regroupement de plusieurs ministères dans des édifices communs appartenant à l’Etat. En effet, de nombreux départements étaient sciemment dissimilés dans des bâtiments privés dans les quartiers insoupçonnés appartenant à des promoteurs immobiliers privés amarrés au pouvoir politique. A ce niveau d’ailleurs, un audit des contrats de bail entre l’Etat et ces spéculateurs immobiliers serait salutaire. «(… ) plus jamais d’injustice, plus jamais de gabégie, plus jamais de corruption», a promis Michel Kafando.

Tel un soldat surexcité, le peuple burkinabè, les 30 et 31 octobre 2014, a foncé et battu le tambour sous la mitraille comme Napoléon au pont d’Arcole. Ces dates rejoindront les annales de l’Histoire politique récente du «pays des Hommes intègres».

Nous sommes tous fragiles quelles que soient nos responsabilités. «L’homme n’est que l’expression parfaite de sa liberté», nous rappelle Jean-Paul Sartre. En clair, les Burkinabè sont devenus ce qu’ils souhaitent eux-mêmes être : des citoyens libres et débarrassés de cette stratégie du marteau et du paquet de friandises. L’exercice indéfiniment prorogé du pouvoir a été un cocktail propice aux immenses crispations sociales dont l’ancien Gouvernement n’a fait qu’apporter un laid saupoudrage à la démocratie burkinabè. En effet, en voulant user indéfiniment des méthodes à la pieuvre, Blaise Compaoré s’est fait encombrant auprès de ses plus proches et fidèles collaborateurs qui ont eu de l’estime et du respect pour lui. 

Mais «l’homme fort» du Burkina est-il le seul coupable et responsable de ces moments difficiles qu’a traversés le pays ? Non. Peut-être le pire aurait-il été évité si ces députés sans compétence ni droiture morale n’avaient poussé le chef de l’Etat dans une flagornerie dont lui-même devrait prendre la mesure quand on sait qu’il a de la bouteille dans la carrière politique. Mais enfin ! Tout flatteur vit au… Il y a comme une sorte d’ivresse dans les hauteurs. Blaise Compaoré a contribué inutilement à mettre à terre les pièces détachées de la République pour laquelle lui-même a donné de sa vie. Il a dilapidé en 48 heures l’exceptionnel capital de popularité dont il disposait.

«Il y a du mérite sans élévation mais il n’y a point d’élévation sans quelque mérite», La Rochefoucauld. Le Burkina Faso doit sortir de ces Républiques calamiteuses tropicalisées où les chefs d’Etat se croient toujours investis en unique et indiscutable curé du village.

En réalité, le régime de Blaise Compaoré dont lui-même avait déjà épuisé le charme depuis maintenant une décennie, était une démocratie en trompe-l’œil. Rappelez-vous : des élections régulièrement organisées sous la supervision de l’ODP/MT et plus tard du CDP, des scrutins dont les résultats sont connus avant même la fin des votes. On notait aussi sous l’ancien régime, la politisation de l’administration, des «disparitions» suspectes de personnalités et de citoyens ordinaires, la délinquance économique et la confiscation de la manne financière par un clan propulsé aux manettes des fleurons de tous les secteurs «juteux» de la société.

C’est connu et admis : les régimes combinant les attributs de la démocratie et de l’autoritarisme finissent toujours dans la poubelle de l’histoire. Blaise Compaoré a donc quitté le pouvoir après 27 ans de présence au sommet d’un Etat dont le sort que lui réserve le sort n’est pas pétillant ! Il commence une nouvelle vie en tant qu’«évadé» du palais présidentiel. Une sortie assez étroite quand même !

Cet exil auquel il va devoir s’habituer va-t-il mettre son moral en berne ou au contraire va-t-il requinquer cet «homme si fort» ? Ici au Burkina, et en attendant, une vague d’optimisme semble submerger le Burkina Faso.

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