Le FMI a baissé… « Lagarde » de l’orthodoxie?
Selon le site français Médiapart, Eugène Nyambal, ancien cadre camerounais du FMI, a porté plainte contre l’institution financière aux Etats-Unis.
D’après Médiapart, Eugène Nyambal, dans la plainte déposée contre son ex-employeur, met en relation son licenciement en 2009 du FMI et les réserves qu’il avait exprimées quelques mois plus tôt au sujet du projet d’exploitation du cobalt et nickel de Nkamouna, soumis au FMI par les autorités.
Le bras de fer qui oppose l’ancien conseiller spécial de l’administrateur du FMI pour l’Afrique, le Camerounais Eugène Nyambal, à son ancien employeur prend de nouvelles proportions. Selon le site français Médiapart, l’économiste camerounais met le FMI à l’index sur sa responsabilité présumée au sujet d’une escroquerie financière qui a englouti plusieurs dizaines de millions USD de fonds publics appartenant à l’Etat camerounais. Le gardien de l’orthodoxie financière qui a déjà mené une enquête sur l’affaire, pourrait, cette fois, se voir accusé de complicité de corruption par le tribunal de Columbia aux Etats-Unis, sur l’exploitation du cobalt-nickel de Nkamouna à l’Est du pays.
D’après Médiapart, Eugène Nyambal, dans la plainte déposée contre son ex-employeur, met en relation son licenciement en 2009 du FMI et les réserves qu’il avait exprimées quelques mois plus tôt au sujet du projet d’exploitation du cobalt et nickel de Nkamouna, soumis au FMI par les autorités camerounaises. À l’époque, le gouvernement camerounais, dont le ministre des Finances était un ancien salarié du FMI, avait adressé une demande à l’endroit de l’institution de Bretton Woods concernant l’autorisation du déblocage des fonds pour l’exploitation d’un gigantesque gisement de cobalt-nickel situé à Nkamouna. Employé au sein de l’institution pendant cette période, Eugène Nyambal relèvera que cette opération présentait un certain nombre de risques au regard du dossier soumis à l’appréciation du FMI.
Dans sa plainte, l’économiste met en évidence plusieurs indices qui étayent la thèse d’une corruption organisée ayant contribué au détournement de plusieurs dizaines de millions USD au détriment du Cameroun. Parmi les indices que fait valoir l’ex-agent du FMI, il y a le fait que «le profil de Geovic Cameroun (GeoCam), l’entreprise minière devant exploiter le site de Nkamouna, n’était à l’époque pas plus rassurant: c’est une filiale d’une compagnie américaine, Geovic Mining Corportaion, créée en 1994 dans le Delaware, un Etat de la fédération américaine, qui a pour particularité de n’avoir jamais exploité nulle part le moindre minerai».
Selon le site français, Geovic Mining Corporation, dans ses différents rapports financiers, y compris ceux de 2007 et de 2008, indique que rien ne garantit qu’elle générera un jour des bénéfices ou même qu’elle pourra mettre en production Nkamouna. «Nous sommes une société en phase d’exploration et n’avons pas d’antécédents d’exploitation en tant que société d’exploitation. Toutes les recettes et les bénéfices futurs sont incertains», écrit-elle dans un rapport exploité par Médiapart.
Autre problème soulevé par la plainte, GeoCam a obtenu en 2003, par décret présidentiel, son permis d’exploitation du gisement de Nkamouna en violation de la Convention minière signée avec le Cameroun. Selon celle-ci, l’entreprise avait l’obligation de présenter une étude de faisabilité, ce qu’elle n’a pas fait. L’étude en question n’a été réalisée qu’en 2011, soit 8 ans plus tard. Bien plus, Eugène Nyambal soulève l’opacité qui entoure l’identité des actionnaires de ce dossier. D’après lui, le flou entourait l’identité des actionnaires camerounais de GeoCam, détenteur au début du projet près de 40% des parts de l’entreprise.
En 2008, le gouvernement camerounais a, selon Government Accountability Project (GAP), une Ong américaine spécialisée dans la protection des fonctionnaires et salariés dénonçant des cas de corruption, refusé de communiquer au FMI leurs noms. Il est apparu plus tard qu’ils étaient 4 parmi lesquels Jean-Marie Aleokol, secrétaire d’Etat à la Défense de 2004 à 2007 et élite de la localité. Les autres sont un couple d’inconnus et une nièce de l’ancien Premier ministre, Simon Achidi Achu, président depuis 2003 du conseil d’administration de la Société Nationale d’Investissements (SNI).
Plus curieux, relève Médiapart, en 2006, le Cameroun est devenu actionnaire à 39,5% de GeoCam en rachetant, justement via la SNI, les parts de ces 4 privés camerounais: une partie (20%) pour lui et l’autre au portage pour le compte de ces citoyens. Il s’est également engagé à contribuer aux augmentations de capital pour ces derniers. Or, remarque GAP dans un de ses rapports envoyés au FMI, les lois camerounaises n’autorisent pas l’Etat à acheter des actions pour le compte d’individus. Il s’agit donc d’une mesure illégale qui s’apparente à un détournement de fonds publics.
Juste après que le Cameroun est devenu actionnaire de GeoCam, Geovic Mining Corp, lui a réclamé 81 millions USD (plus de 40 milliards CFA) pour des dépenses pré-opérationnelles engagées avant son entrée dans le projet, précise un rapport de la SNI datant de 2007 et fourni au FMI.
Devant les protestations de Yaoundé, Geovic a accepté un remboursement de seulement 31 millions USD, sans que la différence de 50 millions (25 milliards CFA) n’apparaisse dans ses états financiers. Ce qui laisse penser, qu’au moins une partie des dépenses annoncées par Geovic Mining Corp. étaient fictives, souligne Nyambal qui déplore: «L’actionnaire minoritaire, l’Etat du Cameroun, s’est retrouvé en train de supporter les frais imputables à l’actionnaire majoritaire».
Qu’en dit le président du FMI, Christine Lagarde?