Après l’Eléphant guinéen, l’Eléphant ivoirien?
Entré dans la compétition sans tambour ni trompette, hormis ceux de sa petite chambrée de supporters, le Mali a tracé un parcours presque en se cachant. Une victoire pour commencer face à la Guinée, alors que les hommes de Michel Dussuyer avaient montré plus de maîtrise du jeu, suivie d’une défaite face au Ghana (0-2) et d’un succès au forceps devant le Botswana (2-1).
Sa première victoire aura donc été décisive. Derrière le Ghana, légitime favori du groupe, on savait que la deuxième place se jouerait très vraisemblablement entre Maliens et Guinéens.
Les premiers ont gagné le match le plus important, le premier jour, et ils ont fait le strict nécessaire frôlant la correctionnelle lorsqu’ils furent menés par les Botswanais sur un but de Mogakolodi Ngele. L’inquiétude ne dura qu’une poignée de minutes, le temps d’égaliser mais pour un prétendant aux quarts de finale, ce ne fut pas très rassurant.
Bien peu accordèrent aux Maliens du crédit avant qu’ils n’aillent défier sur leur pelouse les Panthères de Gernot Rohr. Les Gabonais avaient réussi un très bon parcours et semblaient partis pour prolonger leur aventure.
«On n’était pas favori» reconnaissait volontiers l’entraîneur des Aigles, Alain Giresse, mais on l’a fait aurait-il pu ajouter.
Son équipe a fait preuve de beaucoup de réalisme, ne cédant jamais à une quelconque inquiétude. Elle ne brillait pas mais elle s’opposait sans céder aux assauts des Mouloungui, Madinda, Aubameyang et Cousin, le quatuor offensif censé détruire les protections mises en place autour de Soumaïla Diakité. Elle encaissa le but de Mouloungui après avoir été éliminée une demi-heure avant de chercher son égalisation à 6 minutes du coup de sifflet final, alors que les carottes paraissaient définitivement cuites.
Le Mali pourrait reprendre à son compte la philosophie ivoirienne: on défend d’abord, on fait tout pour ne pas encaisser de but et devant on trouvera bien une occasion pour passer. En résumé, on n’est pas sur le terrain pour faire du spectacle, on est venu pour réaliser une performance dans le plus grand rendez-vous du football africain.
Or ce sont précisément les adeptes de cette philosophie, dont le maître fut longtemps le Cameroun que les Aigles vont devoir affronter dans une demi-finale doublée d’un derby de l’Ouest. Là encore, c’est sûr, les Maliens porteront l’étiquette de challenger. La Côte d’Ivoire de François Zahoui a réalisé le sans faute absolu depuis le début des éliminatoires: 10 matches consécutifs sans défaite.
Calfeutrés dans leur retraite, ils s’apprêtent à déclencher une nouvelle charge des Eléphants. Contre les Equato-Guinéens en quart de finale, ils ont laissé faire Didier Drogba, qui n’avait peut-être affiché une telle forme dans une CAN, et dont les deux buts furent dignes du meilleur joueur de Chelsea qu’il fut longtemps. Le troisième but ne faut pas moins beau, un coup-franc splendide de Yaya Touré, à montrer dans toutes les écoles de football. Ces deux gaillards ont un tel vécu qu’ils peuvent renvoyer à la maison tous ceux qui désirent enfermer les Eléphants dans une sorte de tour d’ivoire. On sent une envie terrible chez les Ivoiriens de gagner ce trophée. On leur a tellement dit et répété que ce serait la dernière occasion d’imiter les gars de 92 qu’ils se sont mis à y croire et à vouloir leurs lèvres dans la Coupe, que l’on accueillerait les bras ouverts sur les bords de la lagune Ebrié.
Les Maliens ont l’avantage de n’avoir, à l’inverse de leur adversaire, aucune pression. Raison de plus pour se méfier de l’eau qui dort. Le football malien est souvent allé là où on ne l’attendait pas en Coupe d’Afrique: une finale, il y a 40 ans, perdue alors qu’il était le favori, et plus près de nous, deux demi-finales.
L’histoire n’est là que pour rappeler que le football malien a une histoire et que l’Aigle 2012 n’est pas un petit aiglon sorti de son nid. On a vu que les favoris avaient connu quelques déboires, que jusque là les matches avaient été serrés.
Les Eléphants sont prévenus. Leur adversaire n’est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds pas mêmes par les pattes de l’Eléphant. Il a déjà dompté lors de la première journée l’Eléphant guinéen.