Hervé fait rêver!
Vous êtes l’un des rares sélectionneurs de la Côte d’Ivoire qui devra résider à Abidjan. Est-ce un avantage ?
C’est ce que la Fédération ivoirienne de football a souhaité. Le président Sidy Diallo voulait un entraîneur qui travaille dans la durée et qui accepterait de résider en Côte d’Ivoire. Cela ne me pose aucun problème. En fait, ce n’est pas un événement pour moi, puisque depuis 2007 date à laquelle je suis arrivé sur le continent je m’y suis en grande partie installé.
Contrairement à Sabri Lamouchi, vous avez reçu un accueil princier à Abidjan…
Je voudrais remercier tout le peuple ivoirien pour l’accueil. Mais je ne suis pas naïf. C’est simplement un accueil. Je ne vais pas dormir sur mes lauriers. Je viens avec les mêmes objectifs que tous les Ivoiriens parce que je ne me contente pas de petites choses et je sais que les attentes sont nombreuses. Je sais ce qui m’attend.
Comment s’est fait votre contact avec ce continent africain?
C’est grâce à un Monsieur, Claude Leroy, que j’ai découvert l’ Afrique pour la première fois. J’ai eu la chance de l’avoir comme mentor. C’est lui qui m’a appris le métier de sélectionneur en Afrique avec une obligation de résider toujours dans le pays dans lequel on travaille. Je me suis donc évertué à remplir cette condition. Et je pense qu’il avait raison. Parce qu’il n’est pas toujours facile de s’imprégner du football local qui est la source de ce qui se traduit après au niveau des plus grandes compétitions africaines ou mondiales.
Concrètement, qu’est-ce que la Fédération ivoirienne vous demande d’accomplir ?
Ma mission est claire. Il m’a été demandé de reconstruire une nouvelle équipe tout en sachant que tout n’est pas à jeter. Surtout quand on a autant de qualités dans l’effectif que nous avons à gérer. Dans une équipe, il faut garder ses qualités en apportant des retouches, petit à petit.
Alors que l’on parle de repartir à zéro, vous annoncez que la révolution n’aura pas lieu. Comment comptez-vous donc bâtir cette nouvelle équipe nationale de Côte d’Ivoire ?
Il faut être réaliste. Les premières échéances arrivent à grands pas. Dès le mois de septembre nous attaquons les éliminatoires de la Can 2015 avec un premier match à Abidjan. Nous allons donc apporter quelques petites touches pour donner un nouveau dynamisme à cette équipe dans une voie qui doit l’amener jusqu’aux Coupes d’Afrique des Nations (CAN) 2015, 2017 et à la Coupe du monde 2018. Tout en espérant que la Côte d’Ivoire obtiendra l’organisation de la Can 2019.
Sans la grande révolution, peut-on dire que vous allez viser la CAN 2015, au Maroc ?
Quand on est deuxième nation africaine au classement Fifa et dans une position sans dote meilleure dans quelques mois, je ne pense pas qu’on puisse aller dans une compétition en se disant que l’objectif, ce sont les quarts de finale. C’est et ce sera sera un discours inapproprié au regard de la qualité de cette équipe et surtout de ses joueurs. Si en 2012, j’ai eu la prétention (certains me l’on reproché) de dire que la Zambie, que je dirigeais alors, allait à la CAN pour gagner. Aujourd’hui je ne peux pas tenir un autre discours avec la Côte d’Ivoire. Je suis obligé de gagner cette Can. Maintenant le football est tel qu’on aimerait tout remporter mais ce n’est pas toujours facile et ce n’est pas toujours possible. Quand vous prenez l’Allemagne qui a fait sa révolution après le mondial 2002, il a fallu trois demi-finales de Coupe du monde avant de la gagner en 2014. C’est dire que parfois, il faut du chemin, des obstacles, des échecs pour pouvoir arriver à la consécration.
Vous allez travailler avec des joueurs de la dimension de Didier Drogba, Yaya Touré, Kalou, Gervinho…
C’est excitant. D’abord, il me faudra gagner leur confiance. Avoir un discours simple, clair et précis. C’est la première fois, de ma carrière que je vais entraîner de vraies stars et une équipe autour de laquelle, il y a beaucoup de pression et de passion. En me portant candidat, je le savais. Je ne vais pas fuir mes responsabilités.
Il y a aussi l’équipe nationale B composée de joueurs évoluant dans le championnat national. Avez-vous une idée de celle-ci ?
C’est quelque chose que je connais bien. Puisque j’ai eu la chance de disputer la première édition du CHAN ici même en Côte d’Ivoire en 2009. C’est un bon souvenir Car nous avions fini le tournoi 3ème avec la Zambie. C’était le commencement du travail effectué en Zambie qui nous a emmenés à la victoire de 2012. Donc même si la Côte d’Ivoire possède de nouveaux joueurs professionnels répartis dans le monde entier, je pense que ce serait une erreur de négliger le football local. J’ai d’ailleurs assisté à la finale de la Coupe de Côte d’Ivoire entre les deux meilleurs clubs du moment, l’ASEC Mimosas et le Séwé Sport de San Pedro. J’ai vu des joueurs de qualité dans ce match, comme il y en a partout en Afrique. C’est à eux de montrer qu’ils peuvent bousculer la hiérarchie.
Comment comptez-vous mener à bien cette mission?
Il faut beaucoup de travail. J’entends par travail qu’il faut imposer une certaine discipline, exploiter au mieux tous les talents individuels, et dieu seul sait combien ils sont nombreux. Il faut gérer et emmener tout le monde sur la voie d’un esprit collectif. Ce sera la première tâche sur laquelle je m’attarderai le plus. Je serai intransigeant sur ce point parce que je considère que sans esprit collectif on n’est pas capable d’achever de grands projets. En tout cas, durant tout le long de mon séjour en Côte d’Ivoire, je sillonnerai avec mon staff tous les terrains de première division, parfois de divisions inférieures. Parce qu’il y a toujours des joueurs plus jeunes qui évoluent dans les divisions inférieures. Ce qui m’importe, ce n’est pas de regarder la qualité de ces équipes puisque je ne suis pas leur entraîneur, mais trouver des talents parce que même dans des équipes qui sont moyennes collectivement, il y a un joueur qui peut émerger et qui, individuellement, peut apporter quelque chose et c’est là notre travail principal.
Savez-vous qu’il y a un véritable problème d’egos qui mine cette sélection ivoirienne ?
Il est toujours préférable d’avoir des joueurs de grande qualité dans une équipe. Car c’est avec le talent qu’on réussit à faire de grandes équipes. Pas seulement en étant que des travailleurs. Par contre, il faut associer travail et discipline collective. C’est pour cela qu’il faut tout de suite bien définir les choses et s’y tenir. Mais je pense que l’une de mes forces c’est de ne jamais déroger à mes principes et je ne transigerai pas. Pour moi, le collectif sera toujours plus important que les individualités.