Armée est.. féminin!
Le grade de général dans l’armée ivoirienne a été attribué pour la première fois à une femme qui a fait ses armes dans la grande muette de son pays. Il s’agit du médecin général de brigade Kouamé Akissi.
Le grade de général dans l’armée ivoirienne a été attribué pour la première fois à une femme qui a fait ses armes dans la grande muette de son pays. Il s’agit du médecin général de brigade Kouamé Akissi. C’est un exploit car en 30 ans, le nombre de femmes militaires n’a jamais dépassé 100 et il n’y a que 26 femmes officiers. Portrait de celle qui a bouleversé l’histoire de la hiérarchie militaire en Côte d’Ivoire.
Depuis le 6 août 2012, elle est la première femme à avoir atteint le grade de général dans l’armée ivoirienne. Du haut de son mètre 60, cette femme de 59 ans se dresse fièrement aux côtés des autres généraux, des hommes bien sûr, pour apporter toute sa sensibilité de femme à l’armée au moment où la Côte d’Ivoire sort progressivement de plus d’une décennie de crise politique.
Cette ascension au sommet de la hiérarchie des forces républicaines de Côte d’Ivoire, elle le doit à son courage et à une tête bien faite. En effet, elle est bardée de diplômes obtenus lors de sa formation universitaire comme post universitaire.
En prenant connaissance de son parcours, on s’aperçoit qu’elle est titulaire d’un doctorat en médecine auprès de l’Université d’Abidjan.
Cette fille issue d’Assakra, village situé dans la sous-préfecture de Kpêbo dans le département de Toumodi à 240 km d’Abidjan, la capitale économique, a brillamment obtenu un certificat d’études spécialisées (CES) en gynécologie et obstétrique et en échographie toujours auprès de l’Université d’Abidjan puis à Brest en France.
C’est avec ces diplômes qu’elle a entamé son cursus militaire. Kouamé Akissi a gravi les échelons dans une armée où les femmes sont toujours sous représentées. Elle a fait son entrée sous les drapeaux comme étudiante le 10 Janvier 1981.
Elle a ensuite obtenu son brevet de parachutiste auprès de la compagnie des para-commandos du 1er bataillon d’Akouédo en 1983.
Depuis, elle n’a cessé de progresser, passant du grade de capitaine à celui de commandant, de commandant au grade de lieutenant colonel et colonel et de là à celui de colonel major pour finir par être nommée générale de brigade.
Son parcours n’a pas été de tout repos comme elle le raconte: «Je me suis intéressée à l’armée en raison de sa rigueur et sa discipline. C’est en lisant le quotidien Fraternité Matin en 1980 que j’ai vu que les étudiantes en médecine étaient désormais admises au sein de l’armée. Contre toute attente, mes parents m’ont dit de foncer. Je les ai écoutés.
Lors du stage, nous étions cinq femmes au départ. Les hommes étaient très surpris de voir des femmes officiers dans cet univers qu’ils considéraient le leur.
Nous avons fait notre service militaire à Bouaké dans le centre du pays. Lors du premier saut en parachute, celui-ci s’est avéré anodin mais lors du deuxième saut, le doute a commencé à gagner tout le monde.
J’ai pris mon courage à deux mains et j’ai sauté. A la fin du saut, alors qu’on était encore dans la cocoteraie de Grand- Bassam, il y avait à l’époque des militaires togolais parmi nous.
Un sous- lieutenant togolais a avoué après cet exercice que c’est grâce à moi qu’il a pu sauter. Il a dit ceci : Je ne pouvais pas ne pas le faire. Car, si je repartais au Togo sans l’avoir accompli alors qu’une femme l’avait réussi, le Président Eyadéma allait me jeter en prison. »
Les témoignages et propos pleins d’admiration ne manquent pas à l’égard de Kouamé Akissi. La plupart de personnes interrogées se disent fière de voir une femme aussi méritante à un poste très élevé au sein de l’armée. « C’est une femme d’honneur et de devoir.
Une figure de proue dans l’armée ivoirienne et un exemple à suivre pour les femmes», affirme Roger Yao, président de la Mutuelle pour le Développement Economique et Social d’Assakra, son village natal.
A l’écouter, en accédant à ce rang, Kouamé Akissi devient une icône, un modèle et une référence pour beaucoup d’Ivoiriennes, surtout pour les femmes qui manquent de courage et d’ambition.
Elle est consciente de ce qu’elle représente aux yeux des femmes de son pays. « En tant que première femme générale en Côte d’Ivoire, je dois être un exemple pour toutes les femmes et les jeunes de mon pays tant dans ma conduite de tous les jours que dans mon travail », a-t-elle reconnu.
Pour avoir milité au sein des mouvements féminins de Côte d’Ivoire – elle est d’ailleurs membre fondatrice du Réseau des Femmes Leaders de Côte d’Ivoire, la générale Akissi reste néanmoins une féministe en treillis qui souhaite voir un plus grand nombre de femmes gravir les échelons au même titre que les hommes.
Une ferme conviction l’habite et c’est celle qui veut que la femme change le visage de l’armée de par sa sensibilité et sa dynamique de faiseuse de paix.
Elle défend sans cesse le rôle important de la femme militaire dans l’armée ivoirienne. Et un grand nombre sont médecins, révèle-t-elle. Elle souhaite que les femmes soient en plus grand nombre puisque l’école des officiers est maintenant accessible aux femmes, parité oblige!
Son rang de générale ne lui est pas monté à la tête. La première dame de l’armée ivoirienne range ses épaulettes et ses galons dans le placard dès qu’elle franchit les portes de sa maison.
Et là, elle retrouve son cocon familial. Mère de deux enfants, elle assume pleinement son rôle de femme à la maison. Tout cela avec le soutien de son époux.
« A la maison, c’est mon époux qui est aux commandes et je redeviens un simple soldat », confie-t-elle avec modestie.
Une humilité qu’elle conserve même dans l’armée: « Je voudrais avec la grâce de Dieu faire de mon mieux pour mériter ce grade de général. Je suis déjà encadrée par mes aînés généraux et je sais que leurs conseils me seront utiles.»
Elle est l’exemple à suivre pour ces milliers de femmes qui ambitionnent de faire carrière dans l’armée avec comme seules armes leur intelligence, leur courage et leur combativité.