Zida a des idées… sankaristes?
L’histoire politique du Burkina Faso s’est accélérée ces derniers temps, avec le départ précipité de Blaise Compaoré du pouvoir, le 31 octobre dernier, après 27 ans de pouvoir, sous la pression de la rue. Et un homme s’est particulièrement illustré durant ce laps de temps: le Lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida.
L’histoire politique du Burkina Faso s’est accélérée ces derniers temps, avec le départ précipité de Blaise Compaoré du pouvoir, le 31 octobre dernier, après 27 ans de pouvoir, sous la pression de la rue. Et un homme s’est particulièrement illustré durant ce laps de temps: le Lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida. D’abord, en prenant ses responsabilités et en se proclamant chef de l’Etat, après la démission de Blaise Compaoré et surtout le discours du Chef d’Etat-major général des armées qui avait, quelques heures avant lui, aussi annoncé sa prise du pouvoir. Ensuite, en réussissant à faire l’unanimité autour de sa personne au sein de la Grande muette pour conduire la transition. Enfin, en menant de main de maître les tractations pour aboutir à une feuille de route traçant les sillons et jetant les jalons de la transition, en vue de remettre le pays sur les rails. Inconnu du grand public, il y a de cela quelques semaines, le lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida est passé de l’ombre à la lumière, en l’espace de 15 jours.
Celui que les Burkinabè et la Communauté internationale découvraient, le 31 octobre dernier, à la faveur de sa prise de pouvoir, procure aujourd’hui étonnement, fierté et admiration de la part de ses compatriotes et des amis du Burkina. Après avoir suscité doute et scepticisme, surtout en raison de sa fonction de commandant en second de la sécurité du président déchu, Blaise compaoré, Zida aura admirablement su gagner la confiance des Burkinabè tant par ses paroles que par ses actes. Et en paraphant, le dimanche 16 novembre dernier à la Maison du peuple, la Charte de la transition qui ouvre la voie à une dévolution du pouvoir aux civils comme il l’avait promis, Zida est entré dans l’histoire du Burkina par la grande porte, en respectant la parole donnée.
Tout cela, après avoir rétabli la Constitution qu’il avait suspendue à l’occasion de sa prise du pouvoir. Par cet acte, il confirme qu’au Burkina Faso, il existe bel et bien des hommes intègres qui ont le sens de l’honneur, de la dignité et de la responsabilité. Et toutes les fleurs qu’on lui jette aujourd’hui sont autant d’éloges mérités, car Zida est à féliciter et mérite la reconnaissance de tout un peuple.
Zida a conquis le cœur de bien des Burkinabè
Finalement, il se sera révélé comme l’homme de la situation, l’homme qu’il fallait aux Burkinabè pour gérer cette période trouble et incertaine, marquée par des velléités de toutes sortes pour conduire la marche de la Nation. Ce qu’il a fait en si peu de temps mérite respect et considération. Par ailleurs, si la signature de la Charte était quasiment acquise et attendue, le tranchant de son discours, à l’occasion de la cérémonie, aura laissé beaucoup de personnes sans voix.
En effet, beaucoup n’en croyaient pas leurs yeux et surtout leurs oreilles. Car, Zida a non seulement paraphé le document de la Charte de la transition qui ouvre le chemin à une transition conduite par les civils comme il l’avait promis, mais aussi et surtout, il aura surpris bien des Burkinabè et des observateurs par la teneur de son discours qui aura été d’un tranchant hors du commun, et surtout insoupçonné en certains points, de la part d’un homme comme lui qui aura été aux côtés de Blaise Compaoré pendant toutes ces années.
Les piques qu’il a lancées à l’endroit de son prédécesseur et ex-patron, ainsi que de tous ses courtisans serviles qui l’ont poussé et encouragé dans son chemin de perdition, prouvent à souhait que Blaise Compaoré, de toute évidence, avait emprunté un très mauvais chemin dans la mesure où même dans ses cercles les plus proches, une masse silencieuse était loin de cautionner ses velléités de tripatouiller la Constitution de son pays.
Certains croyaient rêver et pourtant, leurs oreilles n’ont pas sifflé. Zida a bel et bien parlé de «l’insistance insensée et [de] la myopie politique de la révision constitutionnelle [qui] nous ont profondément secoués, mais une fois encore, le peuple burkinabè en est sorti vainqueur». De même, il a dit «qu’une sagesse bien assumée de la part du Président Blaise Compaoré aurait permis d’éviter les nombreuses pertes en vies humaines [que] nous déplorons [et] qui ont endeuillé de nombreuses familles». En même temps, il a aussi appelé à la retenue, à la repentance sincère de ceux qui se sont égarés, au pardon et à l’inclusion pour un nouveau départ, car «les défis sont énormes et les attentes nombreuses». Pour une position courageuse, c’en est vraiment une.
Assurément, cet homme avait un rêve à vendre à ses compatriotes. Et son action marque un tournant qui permet de rétablir l’image du Burkina qui, de ce fait, passe de république du Gondwana à la véritable patrie des Hommes intègres. En tout cas, avec son discours un tantinet aux relents révolutionnaires voire sankaristes, du 16 novembre dernier, Zida a conquis le cœur de bien des Burkinabè, tant il se sera montré à la hauteur de leurs attentes et de celles de bien des observateurs de la scène sociopolitique du Burkina. Si bien que l’on pourrait se permettre de dire que le peuple burkinabè n’a peut-être pas fini de découvrir le tout Zida. Comme quoi, ce sont les actes des hommes qui les perdent, ce sont aussi les actes des hommes qui les élèvent.
Le grand perdant de l’histoire aura incontestablement été l’ex-président Blaise Compaoré, qui n’a pas su saisir la roue de l’histoire dans le bon sens, alors même que les portes lui en étaient grandement ouvertes.
Quant à Zida, il mériterait amplement d’être hissé au panthéon des grandes figures de ce pays, car le Burkina revient de loin, et a même frôlé le pire. Cela est tout en son honneur et il a désormais une image à défendre.