Kas…savants du zouk!
Après l’Europe, les Caraïbes et le Canada, Kassav a consacré la seconde partie de sa tournée mondiale pour l’Afrique. Ce périple s’inscrit dans le cadre de son projet intitulé« Mawonaj tour » lancé en 2009, à l’occasion du 30ème anniversaire du groupe. Ceci mènera Jacob Desvarieux et son groupe, à partir du 7 au 9 juin, en Angola. Une bonne dose de zouk en perspective va vibrer à Luanda, la capitale angolaise.
Groupe de zouk par excellence et inventeur du genre de musique dans les Antilles, Kassav est devenu une légende vivante. Toutes les influences musicales carabéennes s’y croisent et se mêlent au funk et au rock pour donner un cocktail détonnant et dansant.
De quoi faire bouger la planète entière. Chantant en créole, l’histoire renseigne que Kassav commence en 1979 quand Pierre-Edouard Décimus (musicien dans un orchestre de danse depuis les années 1960) décide, avec Freddy Marshall (un autre musicien antillais), de renouveler et de moderniser la musique qu’ils ont toujours joué. Signalons en passant que le mot Kassav est, à l’origine, une galette de manioc mélangée de la noix de coco.
Très attaché à la musique populaire de carnaval, Décimus cherche à l’adapter aux techniques musicales modernes. Les deux hommes recrutent aussi Jacob Desvarieux, guitariste de studio confirmé et Georges Décimus (le frère du premier), bassiste, ainsi que d’autres musiciens de studio. Le groupe se forme au fur et à mesure.
Cette première mouture du groupe rentre en studio en novembre et, au début de l’année suivante, paraît le premier album de Kassav’, intitulé « Love and Ka Dance » en 1979. Un nouveau genre musical est né: le zouk. L’apparition de nouveaux sons, surtout au niveau des basses, claviers et cuivres donne à cette musique un air de modernité et surtout de fête, une musique vivante et dansante en somme. Kassav commence là à écrire l’histoire du zouk en signant plusieurs albums sur le marché et tant d’autres spectacles à travers le monde.
Le second album s’intitule « Laguémwen » et sort aussi en 1980. Pour la première fois, on peut entendre Jocelyne Beroard dans les chœurs alors que Freddy Marshall assure toujours le chant. Y figure un de leur premier tube, « Soleil ». Le groupe Kassav commence alors à s’imposer dans l’esprit de toute une génération.
Sur sa lancée, Kassav sort un 3ème album en 1981 et accueille Jean-Philippe Marthély au chant ainsi que Jean-Claude Naimro aux claviers. En août, ce sont les débuts scéniques du groupe à travers les Antilles. Les moyens techniques sont importants. Le groupe est accompagné de deux danseuses Catherine Laupa et Marie-José Gibon aux chorégraphies structurées et qui, à l’occasion, participent aux chœurs. Le succès est incontestable.
Le zouk à la conquête de l’Afrique !
Ralph Thamar vient apporter sa contribution au 5ème album du groupe qui sort en 83, sur le titre « My doudou ». La machine est en route. Georges Décimus concocte un nouvel album solo « La Vie » à l’instar de Jacob Desvarieux avec « Banzawa » et Jean-Philippe Marthély avec « Ti coq ». Cela ne les empêche pas de travailler pour le collectif car en fin d’année sort « Passeport », un autre album de Kassav.
Suit d’ailleurs en 84, le septième album de Kassav intitulé « Ayé » alors que Patrick Saint-Eloi enregistre, quant à lui, son 2ème disque « Zouké ». Le groupe entreprend une nouvelle tournée durant la période du carnaval (février-mars) en Guadeloupe et Martinique. Il la reprend en août et va même en Haïti. La même année, Kassav sort un autre album pour Noël, « Yélélé » sur lequel on trouve le titre « Zouk la sésèl médikamannou ni » (Le zouk est notre seul médicament). Grâce à ce tube, la notoriété du groupe explose et dépasse les frontières des Antilles…
Kassav débute l’année 85 en force. Jean-Philippe Marthely en profite pour sortir un deuxième album solo « Rété », alors que suit celui de Jean-Claude Naimro (claviers) qui vient d’enregistrer le sien, « An balatè ». Véritablement propulsée par « Zouk la sel médicament, toute l’équipe commence une tournée en Afrique. Première tournée hors des Antilles avec notamment la Côte d’Ivoire en mars, où le succès est énorme.
D’autres pays africains sont visités et les musiciens et chanteurs du groupe semblent en quelque sorte retrouver leurs racines et les origines de leur musique. A partir du mois de juillet et jusqu’à la fin de l’année, les tournées continuent dans divers pays tels que l’Algérie, la Guyane, Saint-Martin, Sainte-Lucie, l’Angola devant 30.000 personnes à Luanda, le Portugal, le Niger, le Burkina Faso, le Togo, le Bénin, le Gabon, la Côte d’Ivoire et naturellement les Antilles. Et pour clore cette année exceptionnelle, les deux chanteurs Patrick Saint-Eloi et Jean-Philippe Marthély sortent « Bizness ».
1986 : Disque d’Or de Kassav !
On est loin des groupes antillais amateurs qui sévissaient avant l’arrivée de Kassav sur le marché. Début 86, ils fêtent leur premier Disque d’Or devant 40.000 personnes rassemblées en Guadeloupe.
Le 21 juin, jour de la Fête de la Musique en France, est organisé pour la première fois un Carnaval antillais à travers Paris. A la fin du défilé, sur la pelouse de Reuilly, on retrouve le groupe déjà mythique devant 250.000 personnes. L’occasion de présenter « Gorée » (île au large du Sénégal où les esclaves africains destinés au continent américain étaient embarqués) un disque de Georges Décimus et Jacob Desvarieux créé sous l’inspiration de la visite de la Maison des Esclaves.
De nouveaux, déplacements au Portugal, au Sénégal, au Zaïre… Puis, Jocelyne Beroard (qui depuis longtemps a quitté le rang des chœurs pour celui du devant de la scène) sort son premier album nommé « Siwo », qui deviendra le premier Album d’Or féminin des Antilles.
Mais Kassav’ ne s’arrête pas là et, en 1987, les tournées continuent, leur permettant de se produire devant un public sans cesse nouveau comme en Suisse, au Brésil, au Mali ou en Belgique. Ils reviennent à Paris au Zénith pour leur rendez-vous devenu annuel avec le public parisien du 30 avril au 9 mai. En novembre, Kassav sort « Vini pou » chez CBS, multinationale du disque.
L’album devient Disque d’or deux semaines après sa sortie. En ce qui concerne la sortie de leurs albums, ils évoluent maintenant dans la cour des grands. Ils sont d’ailleurs récompensés par une Victoire de la musique comme meilleur groupe, à Paris en 1988. La machine Kassav fait dorénavant zouker partout dans le monde, des Etats-Unis au Japon, en passant par l’Europe tout entière.
Premier groupe noir sur la scène russe !
En juillet, il a le privilège d’être le premier groupe noir à se produire en Russie. Cadeau d’anniversaire pour les 10 ans du groupe Kassav: disque de Platine pour « Majestik zouk ». Une fois de plus, du 14 au 24 décembre, il joue au Zénith à Paris. La décennie se termine en beauté et la suivante démarre sous les mêmes auspices. D’année en année, Kassav continue inlassablement ses tournées sur tous les continents… Et, en 1990, il est sacré Meilleur spectacle, au référendum africain de RFI.
Donc, en 1991, Jocelyne Beroard sort un 2ème album solo « Milans » et Jean-Philippe Marthely fait de même avec « Black Jack » en collaboration avec Ronald Rubinel. Premier changement au sein du groupe, Georges Décimus, un des piliers du groupe, part et est remplacé par Frédéric Caracas.
Jean-Philippe Marthely signe un nouvel album solo « Si sétaw » en 1993 alors que Jean-Claude Naimro quitte, pour une période d’un an, le groupe (il va s’associer avec Peter Gabriel) et se voit remplacé par Thierry Vaton. Kassav continue les tournées et obtient le Trophée du meilleur groupe au West Indies Awards à New-York ainsi que l’AfriCarAward à Abidjan.
A l’automne, le groupe fait la tournée des îles pour une tournée ensoleillée: Mayotte, Seychelles, Comores, Dominique, Curacao. Le groupe reçoit un Music Award à la Martinique pour son concert anniversaire et Patrick le prix de la Sacem du Meilleur artiste de la Guadeloupe. Kassav’ continue les concerts jusqu’au début 2002 et prend une année sabbatique bien méritée. Patrick quitte le groupe.
En 2003, Jocelyne sort son album « Madousinay » et Jacob contribue au succès de « Dis l’heure 2 Zouk », le projet mené par le rappeur Passi. Kassav reprend la route, Belgique, France, Italie, Suisse, Caraïbes.
2004: grand retour de Kassav avec son 14ème album studio d\’originaux, « K’Toz ». Sa popularité est intacte: le groupe triomphe devant 60.000 spectateurs à l’occasion de la 20e édition du festival de BaïadasGatas, sur l’île de Sao Vicente, au Cap Vert.
En février 2005, Kassav’ donne trois concerts à guichets fermés au Zénith de Paris. L’un d’entre eux est filmé et permet au groupe de sortir quelques mois plus tard le DVD de concert « Carnaval Tour ». En avril 2006, c’est le best of « Le meilleur de Kassav » qui est distribué en métropole et aux Antilles. Jusqu’à la fin de l’année, les 5 membres de la formation continuent à se produire dans des petits festivals aux côtés d’artistes comme Jimmy Cliff. En septembre, le chanteur Jean-Philippe Marthély sort un album solo: « KouleIanmou ».
30 ans de carrière!
En 2009, Kassav a fêté ses 30 ans de carrière avec une série impressionnante de concerts. En Côte d’Ivoire, à Abidjan, puis en France, où le groupe remplit quatre Zénith à Paris avant d’enflammer le Stade de France, le 16 mai, avec de très nombreux invités (FallyIpupa, Jocelyne Labylle, Tanya Saint-Val…) et devant 65.000 personnes.
Cette nuit du zouk anniversaire a été immortalisée sur CD et DVD (« Live au Stade de France ») et accompagnée de la sortie d’un triple album-compilation (« Saga ») couvrant la carrière de Kassav, et vendu au prix d’un CD. Kassav’ est parti ensuite souffler ses bougies en public en province, puis en Guadeloupe, en Martinique, en Algérie, aux Etats-Unis, à Haïti et, en décembre, à Dakar, au Sénégal.
Rien ne semble pouvoir arrêter les célèbres « zoukeurs »…Mais en 2010, alors qu’ils s’apprêtent à prendre l’avion pour 5 concerts aux Etats-Unis, 2 des 18 membres du groupe se voient refuser leurs visas. La tournée est annulée. Les membres du groupe sont très affectés par la mort de leur ancien collègue et néanmoins ami Patrick Saint-Eloi, qui s’éteint à Pointe-à-Pitre le 18 septembre 2010.