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LIBERATE NICAYENZI: Sénatrice burundaise pygmée de la tribu Batwa- Entre activisme et politique

Bats-toi pour les Batwa!

Libérate Nicayenzi est une sénatrice burundaise issue de la minorité pygmée twa (1% de la population du pays). Offrir aux Batwa (pluriel de twa) leur place dans l’espace public national, c’est son combat.

altActivisme ou politique? Libérate Nicayenzi oscille entre les deux. À 53 ans, elle est l’unique sénatrice originaire de l’ethnie minoritaire, les Batwa, au Burundi. Pour elle, entre le Sénat et l’association UNIPROBA (Unissons-nous pour la Promotion des Batwa), la structure qu’elle dirige, il n’y a qu’un pas.

Sa journée typique? Un sprint chronométré. C’est parti dès huit heures du matin. Réunion avec son équipe de l’Uniproba. Une heure plus tard, elle file à son bureau au Sénat où elle occupe la fonction de questeur. À midi, pas de pause déjeuner: elle participe à une émission de radio dans une station locale. Elle est à fond sur la question des minorités. En milieu d’après-midi, il fait chaud, elle décélère un peu. Retour au Sénat pour compulser des rapports. Il ne lui reste que quelques heures avant de boucler sa journée.

À la question de savoir d’où provient son engagement en faveur de sa communauté, la voix de Libérate est légèrement brouillée. Elle martèle les syllabes, comme pour marquer le sens de ses mots: « Il est temps que les Batwa comprennent que les droits s’arrachent, qu’on ne vous les apporte pas sur un plateau.« 

Sa détermination pour la cause des Twa remonte à ses années de collège. En 1972, la jeune Libérate a 12 ans lorsqu’elle fait son entrée à l’école secondaire. À l’époque, c’est un exploit pour une fille pygmée. « Lorsque les autres enfants ont su que j’étais twa, ils se sont écartés de moi. Je mangeais seule à l’écart sur une table isolée dans le réfectoire« , confie-t-elle.

Ces discriminations, mêlées à des difficultés financières n’arrêteront pourtant pas sa détermination. Six ans plus tard, elle décroche son baccalauréat, véritable ascension de son ethnie qui enregistre sa première bachelière.

Après ses études, elle enseigne pendant deux décennies. Un mariage avec un intellectuel twa et sept enfants plus tard, la vie de Libérate Nicayenzi prend une autre tournure. Nous sommes en 1997. Son mari, engagé politiquement, est assassiné.

« Un véritable choc » pour cette femme qui n’avait jamais envisagé de faire carrière dans la politique. Pourtant, à la mort de son mari, elle reprend le flambeau mais opte pour une approche différente: mobiliser sa communauté à travers une action associative, tout en gardant un pied sur le terrain politique, pour le lobbying.

Cette même année, elle est cooptée députée à l’Assemblée nationale dans le quota réservé aux Twa. Elle y restera pendant dix ans avant d’entrer au Sénat.

Aujourd’hui, elle parcourt le monde, répétant le même discours: « Les Twa sont des Burundais à part entière. Ils ne demandent qu’à obtenir leur place dans la société« . Pour elle, la priorité demeure l’instruction. « Plus les Twa pourront faire des études, mieux ils s’intégreront« , pense-t-elle. Un accent particulier est mis sur l’éducation des enfants, des filles surtout.

Sa fille aînée est mariée à un Hutu. Un motif de satisfaction pour elle qui considère que les mariages mixtes favorisent l’intégration et brisent les préjugés. Rétrospectivement, elle constate des « améliorations de la condition des Twa« dans le pays, bien qu’elle estime « qu’il y a encore beaucoup à faire« .

D’autres ambitions politiques? Non, martèle-t-elle, catégorique. « Je vais continuer à servir les intérêts twa au sein de l’hémicycle« . D’ailleurs, elle préfère ne pas afficher de couleur politique: « Lorsque vous êtes dans un parti politique, vous perdez votre indépendance« .

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