Découverte Hmani….taire!
La chercheuse tunisienne Mounira Hmani Aifa a été récompensée par l’UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture) et la Fondation l’Oréal pour sa découverte d’un gène de la cécité. Cette bourse spéciale pour les femmes en sciences «sur les traces de Marie-Curie» est attribuée à une ancienne boursière qui a excellé dans le domaine de la recherche.
«J’ai été sélectionnée parmi les 10 boursières de 2002. Cette bourse spéciale a été livrée durant la semaine des femmes en sciences, du 24 au 30 mars, à Paris à celle qui a présenté les travaux de recherche les plus intéressants afin d’encourager les femmes chercheuses à mi-parcours. La grande cérémonie a eu lieu dans la maison de l’Unesco à Paris», souligne Pr Mounira.
Au cours des 14 dernières années, la fondation d’entreprise L’Oréal et l’Unesco ont cherché à récompenser des femmes de sciences qui ont contribué, dans leurs domaines respectifs, à relever les défis mondiaux de demain. Chaque année, le Programme Pour les Femmes et la Science met en vedette l’excellence scientifique et encourage le talent.
Le parcours de cette femme a commencé très tôt. En 2001, Pr Hmani a obtenu son doctorat en génétique moléculaire humaine dont la spécialité était l’identification des gènes responsables de surdité héréditaire en Tunisie.
Ses travaux ont été couronnés par l’obtention de la bourse Oréal Unesco pour les femmes en sciences. Cette bourse a couvert un stage post doctoral à la Faculté des sciences et santé de Linkoping.
«Durant le stage, j’ai travaillé sur la prédisposition génétique à la surdité sur des patients suédois. De retour en Tunisie, j’ai réintégré de nouveau le laboratoire de génétique moléculaire humaine de la faculté des Sciences de Sfax en travaillant sur deux familles atteintes de surdité. Mais, en parallèle, j’avais engagé un nouveau projet portant sur une pathologie rare qui touche l’oeil. J’ai déterminé les gènes responsables d’une nouvelle pathologie qui est la microphtalmie postérieure qui est une réduction disproportionnelle de l’oeil touchant le segment postérieur de l’oeil et entrainant une forte hypermétropie ainsi que d’autres complications secondaires qui peuvent causer la cécité», explique Pr Hmani, qui a mentionné que les premiers cas ont été identifiés par l’ophtalmologue Dr Zeïneb Ben Zina au service ophtalmo au CHU Habib Bourguiba Sfax.
Dr Ben Zina a pu diagnostiquer cette pathologie peu courante et en poussant la recherche, il s’est avéré que plusieurs familles sont atteintes et présentent ce même phénotype.
«Peu de données génétiques concernant cette pathologie sont connues dans le monde. J’ai commencé par étudier les gènes connus responsables d’autres pathologies de l’oeil. Puis j’ai fait un tour de génome qui consiste à balayer le génome entier à la recherche d’un fragment chromosomique qui simule avec la maladie. Nous avons pu localiser le gène sur le chromosome 2 en 2009 en collaboration avec une équipe suédoise. Ce résultat a été publié durant la même année dans la célèbre revue scientifique Human Genetecs», ajoute notre interlocutrice.
Un travail de recherche durant 2 ans a permis d’identifier le gène Press 56 responsable de Microphtalmie Postérieure ( réduction de la dimension de l’oeil) chez l’homme et le glaucome chez la souris. Ces résultats intéressants ont été publiés en mai 2011 dans la revue prestigieuse Nature Genetecs.
Les futurs travaux de recherche vont s’intéresser à l’étude de l’implication de ce gène PRSS 56 dans le glaucome chez l’homme, surtout que le glaucome touche 16 millions d’individus et constitue la deuxième cause de cécité.
«L’intérêt de cette découverte est fondamental vu que le gène identifié est le deuxième gène responsable de microphtalmie connu. Son identification va faciliter la compréhension du développement de l’oeil. Les résultats obtenus sont communiqués aux familles qui bénéficient d’un conseil génétique pour éviter les mariages consanguins et diminuer le nombre des personnes atteintes et d’un diagnostic génétique; ainsi que la liste des individus hétérozygotes qui sont des patients sains», conclut Pr Hmani.