C’est pas si « gay » que ça!
La police ougandaise a fait irruption dans le Théâtre national de Kampala, mercredi 7 novembre soir, mettant fin prématurément à ce qui aurait dû être la première représentation de la troupe des Talented Ugandan Kuchus (TUK). Kuchu est à l’origine un mot dénigrant pour homosexuel, terme repris avec fierté par la communauté gay locale.
La soirée avait bien commencé. Les membres de la troupe et les visiteurs se faisaient photographier devant le logo TUK, au moment où les militants des droits de l’homme, les artistes et les diplomates étrangers foulaient le tapis rouge de la salle de spectacle. La salle était comble.
Bien que certains événements récents, considérés par certains officiels ougandais comme une promotion de l’homosexualité eussent été interrompus par la police du pays – où l’homosexualité est un crime – les organisateurs de l’événement étaient confiants. Il ne se passerait rien de la sorte. Il n’y avait pas eu de publicité pour la première, réservée à des spectateurs venus sur invitation.
Deux heures après l’heure prévue en raison d’une double réservation de la salle, le spectacle des TUK débute tranquillement. Certains artistes non militants montent sur scène. Suivis par un film professionnel, présentant les membres des TUK.
Accompagnés de musique, plus d’une dizaine de jeunes se lancent dans une chorégraphie d’une qualité rarement vue en Ouganda. L’une des histoires représente un homme, habillé différemment des autres et clairement chassé par le groupe, se retrouvant isolé et enchaîné. Le spectacle est étonnant, sensationnel, montrant des hommes habillés en femme et vice-versa. Le mot ‘homosexualité’ n’est jamais prononcé.
L’ entracte est annoncé, le public est enthousiaste. Soudain, une voix annonce par un haut-parleur: ‘La police est entrée dans la salle des commandes et nous oblige à arrêter le spectacle. »
En quelques minutes, les spectateurs terrifiés quittent le théâtre. Seul un petit groupe de membres des TUK reste dans la salle. Des agents de police, lourdement armés, ainsi qu’un homme, grand, habillé en civil et insistant sur le fait qu’il n’est pas à la tête des policiers, oblige tout le monde à sortir. Ils ferment les portes du théâtre.
A l’extérieur du théâtre, au centre de ville de Kampala, la colère monte parmi les militants. « Le théâtre n’est-il pas pour tout le monde? » demande un jeune homme, prénommé Mohammed.
Plus tôt dans la soirée, l’optimiste régnait. Frank Migisha, chef de file des militants ougandais, avait harangué la foule, se réjouissant de la victoire du président Obama en Amérique, « signe encourageant pour la communauté gay du monde entier ».