A quel jeu joue l’opposition?
La tension monte chaque jour au Sénégal. En effet, alors que la messe semble définitivement dite après la validation par le Conseil constitutionnel de la candidature du président Wade, l’opposition politique sénégalaise refuse le fait accompli. Tout en allant à la conquête de l’électorat, elle n’a de cesse de rouspéter contre le président Wade qui, impavide et serein tel un crustacé dans sa carapace, a commencé à battre campagne, en témoigne le meeting géant qu’il a organisé le 5 février dernier.
Au fait, le président Wade semble décidé à narguer suffisamment son opposition, convaincu que tout se passera pour lui comme une lettre à la poste. Ce qui n’est pas impossible, d’autant que, à trop faire de la fixation sur la candidature du président Wade, l’opposition sénégalaise risque de se tromper de combat en offrant, sans le savoir, le pouvoir sur un plateau d’or à un patriarche dont la témérité n’a d’égale que son obstination. Il est vrai que ce début de campagne se caractérise jusque-là par une accalmie d’Olympe, mais au regard des plaintes et complaintes qui vaillent, il y a fort à craindre un pourrissement de la situation.
Déjà, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Cheick Tidiane Gadjo, devenu un pourfendeur du régime Wade, est monté au créneau pour exiger la mise en place immédiate d’un conseil national de transition. Ceci pour dire que le président Wade, ne jouissant d’aucune légitimité, il faut nécessairement mettre en place un organe politique pour diriger la transition, et conduire le pays vers des élections libres, démocratiques et transparentes. Et, cerise sur le gâteau, Cheick Tidiane Gadjo déclare qu’il n’est pas exclu que l’opposition politique sénégalaise soit amenée dans les prochains jours à prendre ses responsabilités en organisant un scrutin parallèle auquel ne pourra naturellement pas prendre part le président Wade. Voilà qui complique davantage le situation. Va-t-on vers un blocage de la présidentielle ? En tout cas, tout porte à croire que la classe politique sénégalaise ne manquera pas de prendre in extremis en otage le scrutin du 26 février prochain.
Mais à quelle fin ? A quel jeu joue l’opposition sénégalaise ? Plutôt que de mener un combat d’arrière-garde, il vaudra mieux s’organiser pour contrer Wade dans les urnes, et le renvoyer, bon gré mal gré, cultiver son jardin. Prendre en otage ou boycotter un scrutin, participe du défaitisme, et cela, on l’a déjà dit, ne fera qu’ouvrir le boulevard à un Wade qui n’en demandait pas plus pour se faire réélire avec un score à la soviétique comme l’ont fait bien de ses pairs à travers le continent.
En tout cas, à moins d’avoir fait le choix de l’hécatombe, l’opposition sénégalaise n’a aucun intérêt à compromettre le bon déroulement du scrutin ; ce serait une manière de se tirer une balle dans le pied. Et si tout cela n’était que de la simple gesticulation !