Elle livre un livre à vivre!
Elle est devenue une star dans le monde entier, grâce à son rôle dans le film « Rebelle ». Rachel Mwanza a sorti un livre explosif sur les violences sexuelles, un mal qui touche encore 20.000 enfants à Kinshasa.
Un sujet qu’elle connait bien. Car la jeune actrice congolaise révèle dans son livre-témoignage poignant, cosigné avec Mbépongo Dédy Bilamba qui a pour titre «Survivre pour voir ce jour», qu’elle a elle même été confrontée à cette violence.
C’est la première fois qu’elle se livre autant.
Rachel Mwanza n’avait que 11 ans lorsque sa grand-mère la chassa de la maison, l’accusant d’être une «sorcière».
«À travers ma propre histoire, j’ai décidé de raconter dans un livre la vie des enfants des rues de Kinshasa. Parce que, trop souvent, les gens ne savent pas ce que c’est « vivre dans la rue’ »: des enfants de 6 ans, voire 3 ans, se font violer par de vieux messieurs, de vieux voyous»
Ce cauchemar, elle l’a vécue avec sa soeur. Impossible d’oublier, même si depuis la vie lui a apporté bien des bonheurs. «Un soir de pluie, alors que nous sommes adossées contre un mur en train de grelotter, un homme nous propose de nous héberger. Une fois arrivées chez lui, il nous a violées».
Elle évoque également un autre fléau qu’elle a aussi connu: ces jeunes filles contraintes de se prostituer: «Je surveillais les alentours pendant que mon amie était avec un homme. Je donnais l’alerte si la police débarquait».
Aujourd’hui Rachel Mwanza veut profiter de sa notoriété pour devenir la « porte-parole » et l’ambassadrice de ces enfants abusés. Pour que cela cesse.
Elle veut aussi prouver qu’il est possible de s’en sortir. Son histoire, il est vrai, en est un bel exemple. Elle restera comme la première Africaine à avoir reçu l’ours d’argent de la meilleure actrice, à Berlin pour son rôle dans « Rebelle », du Québécois Kim Nguyen. Elle y interprète le rôle de Komona, une fillette enrôlée de force par une milice rebelle.
Rachel Mwanza a été abandonnée par ses parents, après leur divorce. «Lorsque mes parents ont divorcé, mon père est parti vivre dans une lointaine province du Congo. Puis, il y a eu de graves problèmes dans la famille et ma mère est partie en Angola».
Elle erre dans les rues de Kinshasa (République Démocratique du Congo). Elle a tout juste 10 ans et elle dort à la belle étoile comme des milliers de sans-abri de Kin-la-belle, ces enfants de rue que les kinois ont surnommé les « chégué ».
Rachel finit par être recueillie par sa grand-mère avec ses 6 frères et soeurs. Mais elle a dû mal à subvenir elle-même à leurs besoins. L’adolescente doit partir ou passer pas mal de temps dans des endroits pas toujours bien famés. Elle s’est retrouvée sous l’emprise d’un caïd. Elle travaillait pour lui, et en échange il lui offrait un refuge.
De passage à Kinshasa, Kim Nguyen, le réalisateur qui est à la recherche d’acteurs congolais pour son film « Rebelle », entend parler de Rachel. La suite, il la raconte dans Jeune Afrique: «Elle avait été remarquée par des producteurs européens et avait déjà tourné dans un documentaire. Quand je l’ai vue, j’ai senti qu’elle avait du caractère, et, une fois sur le plateau, elle s’est révélée extraordinaire. C’était assez déconcertant de travailler avec elle, car elle n’avait pas besoin de répétitions, au contraire des acteurs canadiens qui ont toujours l’habitude de répéter avant de tourner. Elle, elle chantait, s’amusait, faisait des grimaces, et au moment où on disait «Action!», elle faisait preuve d’une concentration parfaite, sans préparation».
Ce film a permis à Rachel Mwanza d’avoir un peu d’argent et de retourner vivre chez sa grand-mère. Elle apprend à lire en français et va régulièrement à l’école. «C’est une sorte de miracle que j’aie été retenue pour ce rôle», reconnait Rachel Mwanza.
Son ours d’argent ne la quitte jamais. Mais son regard est aussi braqué sur Hollywood… Et sur les enfants maltraités des rues de Kinshasa. Car son combat est aussi là.
Ses films
2012 : Rebelle
2013 : Kinshasa Kids
(Voir la vidéo de son récit à Jeune Afrique: – Ici –)