Compaoré enseigne?
C’est depuis lundi 19 janvier que la République Démocratique du Congo (RDC) est en ébullition. Cette fois-ci, ce n’est pas un accès de rébellion dont sont coutumiers les millions d’habitants de ce vaste pays, notamment à l’Est. La pomme de discorde, c’est surtout cette volonté affichée du pouvoir en place de procéder à la révision de la Constitution, dont l’objectif inavoué est de permettre à Joseph Kabila de se représenter à la présidentielle de 2006.
Après 3 jours de manifestations, il y a une quinzaine de morts et, petit à petit, le pays est en train de sombrer dans un cycle de violence/répression aux conséquences incalculables. La situation serait très volatile, notamment aux alentours des universités à Kinshasa et à Goma; les étudiants ne voulant pas en démordre.
Jusqu’où ira-t-on surtout que Petit Kabila ne veut pas faire marche-arrière? Et en pire, la machine répressive est allée si loin que depuis lundi, les autorités se sont tirées une balle au pied, avec le black-out Internet et les SMS. L’on a appris que la connexion a été rétablie. Empêcher de communiquer, n’est-ce pas mettre tout un pan de la vie économique, notamment les Douanes, en berne? Du reste, il s’agit là d’une solution cosmétique d’autant que les internautes peuvent bien se tourner (ils l’ont fait d’ailleurs) vers des sites internationaux sur lesquels la censure n’a pas prise. Après la chienlit qui a été installée, il ne manquait plus que pareilles décisions inconséquentes de la part du gouvernement.
Dans cette ambiance des plus moroses, il y a eu la sortie du clergé contre la volonté du clan Kabila de vouloir, coûte que coûte, vaille que vaille, procéder à la révision de certains articles de la constitution. Soit dit en passant, cette volonté est d’autant plus critiquable que lesdits articles sont verrouillés. Cette révision est si inopportune qu’après différentes rencontres à Rome avec le pape François, la conférence épiscopale de RDC a publié, dimanche dernier, une lettre dans laquelle elle réaffirme son opposition à toute modification de la Constitution de la RDC pour une nouvelle candidature de Joseph Kabila en 2016.
Mieux, suite à la dégradation de la situation, Monseigneur Laurent Monsengwo, grande figure de l’église catholique en Afrique, a donné de la voix en appelant le pouvoir à ne pas tirer sur la population. Pour l’instant, elle prêche dans le désert, cette autorité morale incontestable qui a été dans une autre vie un acteur politique majeur de la période de retour à la démocratie qui a suivi la chute du régime du dictateur Mobutu, devenant président du Bureau de la Conférence nationale souveraine de 1992 à 1996.
En sus des manifestations de la population, l’on se rappelle qu’au Burkina Faso, l’église catholique était également montée au créneau face à la volonté de Blaise Compaoré de réviser l’article 37 portant sur le nombre de mandats. On sait ce qu’il advint. Comparaison n’est pas raison, mais les autorités congolaises, à commencer par le président de la République, Joseph Kabila, devraient méditer sur ce pan de l’histoire du Pays des hommes intègres.
Un proverbe bien de chez nous ne prévient-il pas que «lorsque l’âne veut terrasser son cavalier, ce dernier ne fait pas attention à la position de ses oreilles»?