Ombres d’une exécution?
La mort de Morgan, le chef de la milice Maï Maï Simba dans l’Ituri, soulève beaucoup de questions. Après la MONUSCO (Mission des Nations Unies au Congo) qui, dès lundi, annonçait son intention d’envoyer une mission d’enquête sur le terrain, c’est au tour des ONG de défense des droits humains de s’interroger sur les conditions et circonstances de sa mort, alors que lui et 42 de ses hommes étaient placés sous escorte des FARDC.
Morgan était un homme qui savait beaucoup de choses, trop peut-être! Ce chef de milice, accusé de nombreuses exactions contre les civils, était aussi un braconnier. Longtemps actif dans le trafic d’ivoire, il s’était récemment reconverti dans les attaques de mines d’or.
Selon le rapport d’experts de l’ONU publié en janvier, Morgan travaillait en toute impunité, grace à ses relations étroites avec des membres du haut commandement de la région militaire des FARDC à Kisangani. Ces derniers lui fournissaient armes et munitions pour ses miliciens, en échange d’or.
Pour Dismas Kitenge, président de l’ONG Lotus et vice-président de la FIDH, l’annonce de la reddition de Morgan a donc pu inquiéter pas mal de monde dans la région.
«Non seulement il avait des soutiens des FARDC mais il avait aussi le soutien de beaucoup de réseaux mafieux qui étaient impliqués dans l’exploitation de matières premières, qui ont accès aux ressources et entretiennent les seigneurs de la guerre. Sa mort a contribué à faire taire la vérité que ses révélations devaient faire exploser».
Une enquête indépendante nécessaire
Dès lundi la MONUSCO a promis une enquête sur les circonstances de la mort de Morgan. Les ONG de défense des droits de l’homme demandent une enquête indépendante et impartiale. «Ce qui nous inquiète c’est que Morgan en se rendant aux FARDC, il a trouvé la mort. Quand il s’est rendu, ça signifie qu’il l’a fait volontairement et qu’il a été accueilli par les FARDC. Mais maintenant il se pose un problème réel des conditions de sa réédition. Ça nous inquiète dans la mesure où quelqu’un qui a déposé les armes et qui se serait rendu, se retrouve encore être attaqué, (cela) s’apparente à un crime de guerre qui est condamné par les Conventions de Genève. Mais aussi ça risque de porter un coup dur au processus de désarmement, de mobilisation et de reddition des autres groupes armés qui risquent d’avoir peur de se rendre, en disant qu’en se rendant ils peuvent être tués. C’est ce qui nous pousse nous, en tant qu’organisation de défense des droits humains, à demander une enquête indépendante et qui pourrait élucider toutes les circonstances, à la fois de sa reddition et de son décès », conclut Dismas Kitenge.