Drole de pétrole?
Du pétrole a été découvert au large des côtes sénégalaises. Cette découverte est synonyme de prospérité et de relance de l’économie. Mais, selon un spécialiste, des menaces planent sur cette exploitation. Des alertes qui, si on n’y prend garde, peuvent plomber l’exploitation.
La découverte de pétrole au large du Sénégal a suscité beaucoup d’espoir quant à la relance et la bonne marche de l’économie du pays. Mais, il se peut qu’on l’on ait crié à la prospérité trop tôt. En effet, à en croire le directeur d’exploitation de la Sénégalaise de stockage (Senstock), Ibrahima Mbengue, cette découverte récente ne constitue pas à elle seule la panacée, car beaucoup de pays africains se sont englués dans des conflits armés sanglants ; tandis que d’autres ont basé tout leur budget et leur économie sur les revenus du pétrole, négligeant entre autres, les secteurs de l’industrie, de l’agriculture, du mix énergétique. C’est une erreur, selon lui, que le Sénégal ne doit pas faire. D’autant plus que des menaces pèsent sur la bonne exploitation du pétrole sénégalais, soutient l’ingénieur.
La première menace qui risque de porter préjudice à l’exploitation du pétrole au Sénégal est la baisse continue du prix du pétrole: «Actuellement, il est à 50 USD. Et si elle continue, de cette façon, le Sénégal risque de différer la vente du pétrole, parce qu’il sera non rentable», affirme-t-il. A cette baisse, s’ajoute le retour durable de l’abondance du pétrole. En effet, selon Ibrahima Mbengue, le pétrole n’est plus une denrée rare ; au contraire, il y en a beaucoup. Et ce, depuis le début de l’exploitation du gaz de schiste, et le début de l’exploitation du pétrole dans l’Arctique. «Le pétrole est surabondant dans le monde» lance-t-il. Et ceci explique cette baisse qui est passée, en 10 ans, de 125 à 50 USD.
M. Mbengue révèle qu’il y a également un fait politico-économique qui vient s’ajouter à ces menaces. Il s’agit du seuil des 39 USD fixés par les Etats-Unis. En effet, ces derniers avaient dit dans leurs stratégies politiques que si le prix du baril atteint 39 USD, ils auront une réaction appropriée. Et «jusqu’à présent, personne ne sait de quoi il s’agit», fait savoir le conférencier. Qui s’exprimait lors de la célébration du Maritime Day, organisé, par le Propeler club ; une instance apolitique regroupant 35 membres de différentes professions. Selon lui, depuis que les Etats-Unis ont brandi cette menace, le prix du pétrole, ayant frôlé les 41 USD, a aussitôt remonté jusqu’à atteindre la somme de 50 USD.
Le choc entre blocs pétroliers est également une menace, même si on peut y voir un certain avantage. Pour Ibrahima Mbengue, c’est certes un mécanisme de fonctionnement, mais «c’est un mécanisme qui peut également avoir des dérapages». Et de poursuivre : «On voit souvent des personnes acheter un bloc rentable, mais uniquement à des fins spéculatives ; des personnes achètent juste pour pouvoir revendre». Selon lui, c’est la dérive qu’il faut éviter à tout prix. Et cela quel que soit l’acheteur.
Ne pas faire comme le Nigeria
Il révèle que la façon de faire de ces acquéreurs est de se procurer un bloc, en attendant que les prix montent. Ce qui va porter préjudice au Sénégal, car le pays ne pourra pas attendre aussi longtemps pour entrer en possession de ses fonds. L’absence des majors comme Cosmos dans la prospection est une erreur, estime M. Mbengue. Il affirme que le Sénégal a intérêt à signer directement avec ces géants pétroliers, et ceci, dès à présent, du moment que la situation est favorable, et optimiste : «Ils doivent signer en leur augmentant les facilités, parce que cela réduit les rétrocessions de blocs entre financiers, et cela permet de démarrer immédiatement la production».
Un autre fait qu’il faut éviter, et qui constitue une menace, est la corruption. Selon l’ingénieur, c’est une menace très présente car, l’exploitation de pétrole est une histoire de gros sous. Et beaucoup seront tentés de céder à la corruption. Il prend, en exemple, le Nigeria qui fait partie des plus grands pays producteurs de pétrole, mais qui est très souvent en pénurie de pétrole : «Là-bas, les gens font la queue pour avoir du pétrole, alors que c’est un pays producteur».