Corruption sans interruption?
Malgré les multiples méthodes de lutte contre la corruption en Afrique, le phénomène étend encore ses tentacules dans le continent.
Le Botswana a une fois de plus montré qu’il est le pays africain le plus performant dans la lutte contre la corruption. 30ème au niveau mondial, l’Indice de perception de la corruption le classe 1er au niveau africain avec un score de 64 points. Il est suivi du Cap-Vert (41ème mondial avec 58 points) et des Seychelles (47ème mondial avec 54 points). Sur le plan mondial, le Danemark et la Nouvelle Zélande sont en tête avec 91 points. Ils sont suivis de la Finlande et de la Suède (3ème ex aequo) avec un score de 89 points.
Les bonnes performances que le Botswana avait réalisées l’année dernière n’étaient pas un fait du hasard. Le pays vient de rééditer son coup en se classant premier du classement de l’Indice de perception de la corruption que vient de publier Transparency International. Avec un score de 64 points, le Botswana est à nouveau le pays africain le moins corrompu. Il s’est classé 30ème au niveau mondial. L’année dernière, il occupait le même rang avec 65 points alors qu’il était 32ème mondial en 2011 avec un score de 61 points.
La «bonne» position du Botswana s’explique par les efforts consentis dans la lutte contre la corruption passive dans le secteur public et la classe politique. Dans un communiqué, le porte-parole du gouvernement botswanais déclare que le succès de son pays est du à «notre politique de tolérance zéro à la corruption étayée par la mise en place de plusieurs institutions de contrôle, telles que la Direction anti-corruption et criminalité économique (CDCE), le Conseil des marchés publics et d’aliénation des biens publics (PPADB), l’Autorité de la concurrence et l’Agence de renseignement financier».
Le Botswana partage le peloton de tête du classement africain de cette année avec le Cap-Vert (41ème mondial avec 58 points) et les Seychelles (47ème mondial avec 54 points).
Ils sont suivis successivement du Rwanda (49ème mondial avec 53 points), de l’Ile Maurice (52ème mondial avec 52 points), du Lesotho (55 ème mondial avec 49 points), de la Namibie (57ème mondial avec 48 points), du Ghana (63ème mondial avec 46 points), de Sao Tome et Principe (72ème mondial avec 42 points), de l’Afrique du Sud (72ème mondial ex aequo avec 42 points), du Sénégal (77ème mondial avec 41 points), du Swaziland (82ème mondial avec 39 points), du Burkina Faso, du Libéria et de la Zambie (83ème mondial ex aequo avec 38 points)…
Les pays africains qui sont les plus corrompus de la classe sont entre autres le Tchad, la Guinée Equatoriale et la Guinée-Bissau (163ème mondial ex aequo avec 19 points), le Soudan du Sud (173ème mondial avec 14 points) et la Somalie (175ème mondial avec 08 points).
Parmi les pays qui ont le plus perdu de points dans l’index 2013 se trouvent la Libye et le Mali, déchirés par la guerre civile et en proie à des conflits militaires majeurs. Finn Heinrich, l’un des chercheurs de Transparency International qui a commenté ce classement 2013 affirme que « la corruption va très souvent de pair avec l’éclatement d’un pays, comme vous pouvez le voir en Libye et en Syrie, deux pays qui ont enregistré la plus forte aggravation de la corruption. Si vous regardez les pays en bas du classement, vous trouvez aussi la Somalie. Ce sont des pays où le gouvernement ne fonctionne pas de façon efficace et les gens doivent recourir à toutes sortes de moyens pour obtenir des services, se nourrir et survivre».
Transparency International a tenu à préciser que le score d’un pays est plus important que le rang. C’est ainsi que, dans le calcul de l’indice de perception de la corruption, il a été déterminé deux zones dont celle qui se situe de 0 à 50 (zone rouge) et l’autre qui est entre 50 et 100 dénommée marche de l’intégrité.
L’Indice de perception 2013 de la corruption montre que sur les 48 pays africains classés, les 43 sont dans la zone rouge, donc un pourcentage de 90%. Seuls le Botswana, le Cap-Vert, les Seychelles, le Rwanda et l’Ile Maurice sont sur la marche de l’intégrité.
Une analyse de l’indice permet de relever qu’un pays comme le Sénégal a fait, cette année, une progression de cinq points sur le score par rapport à l’année précédente. La traque des biens mal acquis, menée par les autorités depuis plus d’un an semble avoir bien influencé le rang et le score du Sénégal dans le classement. «Malgré cette progression, le Sénégal reste tout de même dans la zone rouge, c’est-à-dire au-dessous du score de 50/100».
Le Forum Civil, antenne sénégalaise de Transparency International ramène cette situation au contexte socio-politique et économique de chaque pays ainsi qu’au comportement de ses dirigeants et hommes politiques. Cette posture relevée dans beaucoup de pays africains appelle à un renforcement des moyens vers la marche de l’intégrité.
Parmi les pays qui « se sont le plus améliorés », bien que partant de très bas, Finn Heinrich a soulevé le cas de la Birmanie, où la junte militaire au pouvoir a ouvert la porte à un processus de démocratisation. Ce pays, qui a vu les investissements bondir, s’est engagé à respecter des règles de transparence. Pour lui, «c’est la seule façon qui permette aux pays d’éviter ce que l’on pourrait appeler la ‘malédiction des ressources. C’est le cas du Nigéria et d’autres pays prospères grâce à leur richesse pétrolière ».
Lancé depuis 1995, l’Indice de perception de la corruption rassemble des données provenant d’un certain nombre de sources qui donnent des indications sur la perception qu’ont les milieux d’affaires et les experts du niveau de corruption dans le secteur public et le milieu politique. C’est dans ce cadre que Transparency International invite à plus d’attention dans le financement des partis politiques qui constitue une niche importante de corruption. Il est décrié dans beaucoup de pays africains, le fait que le parti au pouvoir confonde souvent ses propres moyens à ceux de l’Etat.
Compte tenu de la manne financière brassée par les formations politiques en période électorale, le Forum Civil recommande la mise en place d’une loi qui va régir le financement des partis politiques pour diminuer les risques de corruption. Il appelle à une volonté politique avec des hommes intègres au niveau des gouvernements pour le respect des textes et des lois. De l’avis de cette organisation, «il faut mettre des dispositifs non seulement dissuasifs mais préventifs pour lutter efficacement contre la corruption».