Les dirigeants africains ont adopté, le 31 janvier à Addis-Abeba en Ethiopie, une stratégie appelant à un retrait collectif de la Cour Pénale Internationale (CPI).
«Une entente était intervenue, mardi 31 janvier, en vue d’un retrait commun des pays africains», a indiqué le chef de liaison de l’ONG Oxfam International auprès de l’UA, Désiré Assogbavi. La décision, juridiquement non-contraignante, est intervenue lors d’une réunion à huis clos à la fin du 28ème sommet de l’Union Africaine (UA). Pour cause : la CPI se concentre trop sur des enjeux qui touchent le continent africain, ayant trait notamment aux cas de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
Une source proche du comité judiciaire de l’UA a précisé que les pays africains étaient divisés sur la question de se retirer un à un ou dans un front commun. La majorité des Etats ont également voulu que le sens de l’immunité et de l’impunité soit modifié dans le Statut de Rome, qui a fondé la CPI. L’UA a plutôt recommandé le renforcement de la Cour Africaine de Justice et des Droits de l’Homme.
Réagissant à l’information, la directrice adjointe du programme Justice internationale de l’ONG Human Rights Watch, Elise Keppler, a indiqué que la stratégie entérinée discrètement à Addis-Abeba n’établissait aucun calendrier et comprenait «peu de recommandations concrètes pour (un passage à) l’action», avant de rappeler que plusieurs pays africains, dont le Nigeria, le Sénégal et la République du Congo, se sont exprimés en faveur de la CPI durant ces derniers mois.
La menace a été régulièrement brandie depuis le premier mandat d’arrêt international émis en 2009 contre le président soudanais, Omar el-Béchir. Celui-ci est accusé de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre qui auraient été commis de 2003 à 2008 au Darfour. Mais l’éventualité du retrait commun des 34 États africains signataires du statut de Rome s’était accentuée avec la procédure, abandonnée depuis, qui avait visé le président kényan, Uhuru Kenyatta. D’ailleurs, sur proposition de celui-ci lors du sommet de l’UA l’an dernier, une résolution prévoyant « l’élaboration d’une feuille de route pour un retrait de la CPI » avait été adoptée.
A la fin l’année dernière, l’Afrique du Sud, la Gambie et le Burundi avaient tous signifié leur intention de se retirer de cette cour, ce qui avait immédiatement suscité des inquiétudes quant au retrait d’autres États. Pourtant, il y a en l’occurrence deux Africains qui occupent de hautes fonctions à ce tribunal, situé à La Haye, aux Pays-Bas. L’avocate gambienne Fatou Bom Bensouda en est la procureure générale, après avoir été pendant huit ans procureure-adjointe; et Sidiki Kaba, le ministre sénégalais de la Justice, préside l’Assemblée générale des Etats Parties de la CPI pour la période allant de 2014 à 2017.