Saints-Pères… de nom et de fait!
Nouvelle journée historique au Vatican: le pape François a décidé, vendredi 5 juin, de proclamer «saints» deux de ses prédécesseurs, Jean XXIII et Jean-Paul II.
On attendait Karol Wojtyla, pape de 1978 à 2005, dont le processus de béatification puis de canonisation a été mené tambour battant, ce qui fera sans doute de lui le détenteur d’un record historique : être déclaré saint seulement huit ans après sa mort. Les fidèles du très charismatique pape polonais avaient d’ailleurs crié «Santo Subito!» (Saint, tout de suite!) dès le jour de ses funérailles, alors que plusieurs années sont normalement requises avant toute démarche.
Mais le pape argentin a créé la surprise en ajoutant celle du prédécesseur à ces fonctions dont il se sent sans doute le plus proche: Jean XXIII. Surnommé «le Bon Pape», Angelo Giuseppe Roncalli (Pape de 1958 à 1963) est souvent considéré comme le père de la rénovation de l’Église catholique pour avoir lancé le concile Vatican II qui a tracé des lignes novatrices: abandon du latin et du port obligatoire de la soutane, mais surtout liberté de conscience et ouverture aux autres religions et aux non-croyants.
Arrivé du «bout du monde», l’Argentin Jorge Bergoglio a lui aussi entrepris une forme de révolution dans l’Église en s’attaquant à des réformes de la curie et des finances du Vatican qui font déjà grincer quelques dents chez certains prélats au sommet de l’Église.
Signe du fort désir du nouveau pape de coupler les deux canonisations, le pape a approuvé la prochaine canonisation de Jean XXIII, sans même qu’un miracle par son intercession ait été validé, une procédure plutôt rare. La date de cette double cérémonie n’est pas encore connue. Elle pourrait intervenir « avant la fin de l’année », a simplement annoncé le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi.
Cette double canonisation permettrait aussi de relativiser la promotion particulièrement rapide du pape polonais qui a certes marqué l’histoire – notamment pour la chute du communisme –, mais autour duquel subsistent des zones d’ombre, notamment la gestion de la curie et des affaires de pédophilie au sein du clergé. Autre raison qui explique sans doute la décision de célébrer les deux papes en même temps: de par son attitude, Jorge Bergoglio est très proche du souriant et bienveillant Jean XXIII. Ses embrassades pendant ses tours en «papamobile» dans la foule, ses improvisations, son langage direct et simple contrastent avec la personnalité de son austère et timide prédécesseur l’ex-théologien Benoît XVI.
Pour autant, aucune divergence doctrinale ne sépare les deux hommes qui cohabitent dans le plus petit État du monde, après la démission historique du pape allemand qui a stupéfié le monde entier en février dernier.